Une pile de grosses enceintes façon sound system, un salon rétro et un papier peint seventies à motifs orangés : le décor est planté pour l’exposition du photographe Dennis Morris à la Fab, dans le XIIIe arrondissement de Paris. En bande-son, le Jamaïcain Dandy Livingstone gazouille Suzanne Beware of the Devil, hit de 1972. Tout comme le chanteur de reggae, Dennis Morris fait partie de la «génération Windrush», ces immigrants des Caraïbes qui s’installent en Grande-Bretagne après-guerre. Arrivé dans les années 60 avec sa mère, Morris laisse trois petits frères en Jamaïque. «La loi n’autorisait à venir qu’avec un seul enfant», explique l’homme élégant à grosses lunettes, 63 ans aujourd’hui. Morris n’a pas connu son père. A Londres, sa mère travaille à l’usine. Venue pour pallier la pénurie de main-d’œuvre et reconstruire le pays, la communauté caribéenne s’adapte à une nouvelle vie, dans le froid et les logements exigus. «Encore aujourd’hui je déteste avoir froid», frissonne le photographe. Il montre un cliché où trois bouilloires reposent sur le sol entre un lit bébé et un canapé. «Il y avait une famille par pièce, une seule cuisine et salle de bains pour tous. On commençait à cuisiner dans les chambres pour aller plus vite.»
«On était pauvres mais chic»
Aujourd’hui, Dennis Morris est une signature reconnue de la photo rock – il a ph