A l’historienne de l’art Agathe Cancellieri, lui demandant de conclure un entretien d’autant plus testamentaire que réalisé peu avant sa disparition en 2019 à 91 ans, la photographe Barbara Crane répondit sans fioriture : «Je suis extrêmement reconnaissante d’avoir eu une si longue carrière» (1). De fait, la native de Chicago était encore adolescente quand, après que ses parents lui eurent offert un appareil, elle signa ses premiers clichés, ne s’arrêtant ensuite plus jamais, sinon pendant les cinq années concédées à l’éveil de trois enfants engendrés dans un bref intervalle. Une maternité vécue comme une pause forcée, le peu de temps libre que lui laissaient les contingences domestiques étant bien sûr consacré à… prendre des photos de sa descendance.
Ainsi, cinq ans après son décès, découvre-t-on (une petite partie de) l’œuvre foisonnante et significativement éclectique et inspirée d’une artiste qui, pourtant, n’avait pas encore marqué les esprits en France – un peu comme, dans une moindre mesure, sa compatriote Mary Ellen Mark (1940-2015), qui a ébloui cet été les Rencontres d’Arles. Une anomalie que s’emploie désormais à réparer le centre Pompidou qui, à l’ombre de ses expositions blockbusters, a ouvert fin 2014 un espace dédié uniquement à la photo. Une galerie discrète, en vérité, à laquelle on accède non pas par