
Dans l'œil de Libé
Le Brésil en mille regards : Guilherme Antônio dos Santos, des femmes à poil et à vapeur
Par
Dylan Calves
publié le 20 août 2025 à 12h36
Guilherme Antônio dos Santos (1871-1966), bijoutier, galeriste et l’un des propriétaires du cinéma Pavilhão Progresso, était un passionné de photographie stéréoscopique et fut l’un des pionniers de cette technique au Brésil. 
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallIl acquit en France en 1905 un «Verascope» (produit par la Maison Richard), un appareil photo permettant d’obtenir des images 3D à partir de deux photographies quasiment identiques prises sous des angles légèrement différents. Il l’acheta après avoir visité une exposition de photographies stéréoscopiques et constaté qu’il existait très peu de documents sur le Brésil.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesParmi ses pratiques photographiques, celle «porno-érotique» s’inscrit dans la tradition du nu artistique, montrant des femmes nues dans des positions similaires à celles de la peinture classique.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesLa série de photographies stéréoscopiques retrouvée dans la collection des archives photographiques de l’Institut Moreira-Salles représente des femmes en couple ou en groupe, proche de l’imaginaire saphique européen de la fin du XIXe siècle.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesSelon Jorge Leite Jr, le lesbianisme visible dans les productions du tournant du siècle est un exemple du regard masculin, présent dans les images et les textes depuis le siècle précédent. «Les femmes qui s’adonnent à ce plaisir sont présentées dans ces œuvres comme toujours disponibles aux hommes. L’homosexualité y est davantage présentée comme un passe-temps que comme une passion, le véritable plaisir étant toujours atteint grâce à la virilité masculine.»
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesDans des chambres à coucher romantiques ou des jardins fleuris, les styles Art nouveau et Art déco dominent les décors, les femmes étant souvent parées d’accessoires tels que des colliers, des diadèmes.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesDe même, l’architecture s’inspirant de la Grèce antique constituait une stratégie pour conférer aux images pornographiques une acceptabilité artistique, la nudité totale n’étant pas tolérée à l’époque.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesLes organes génitaux apparaissent rarement sur les images, et aucune ne suggère de rapport sexuel.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesCes photographies de Guilherme Santos donnent à voir un photographe bourgeois dans la logique familiale conjugale monogame et la «pureté morale» de son corps social.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesIl s’est manifestement conformé aux normes comportementales qui lui étaient imposées (du moins sur ces clichés), ces normes lui accordaient cependant le droit de fréquenter des «lieux de tolérance» et de collectionner des stéréoscopies érotiques.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira SallesLa majeure partie de l’œuvre de Santos, qui comprend 17 812 négatifs et 9 310 positifs sur verre, se rapproche de celle des photographes européens de la même époque, principalement des paysages et des vues anthropologiques.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira Salles(1) Leite Jr, Jorge, «Des merveilles et des prodiges sexuels : une pornographie bizarre comme divertissement», Annablume, São Paulo, 2006. p.69.
Guilherme Santos/Coleção Instituto Moreira Salles