Qui a dit que littérature et photographie ne faisaient pas bon ménage ? Pas les photographes ni les écrivains dont les liens se resserrent aujourd’hui. C’est traditionnellement à un écrivain que les photographes confient les préfaces de leurs livres. Et au pays de Roland Barthes, les écrivains photographes comme Denis Roche, Hervé Guibert – ou plus récemment Franck Courtès – ont très tôt tissé des affinités entre écrit et image. Dès 2016, sous la houlette d’Aurélie de Lanlay, les Rencontres d’Arles ont invité des écrivains à lire leurs textes : Maylis de Kerangal autour de l’Orient-Express dans l’expo de Marie Bovo ou Pierre Ducrozet autour du transhumanisme chez Mathieu Gafsou. «Il existe des sensibilités communes dans le documentaire, dans l’autofiction et dans le récit intime, affirme Aurélie de Lanlay. Les artistes travaillent dans des veines similaires, les mouvements se croisent et les résonances sont très riches.» Autres exemples : l’écrivain Eric Reinhardt a invité artistes et photographes, à faire une expo sur un quartier de Clichy-sous-Bois. En ce moment, à Paris, l’écrivain Bertrand Schefer, auteur de la Photo au-dessus du lit (2014), est en résidence au BAL où il écrit des textes, forme des lycéens à l’image et invite d’autres écrivains à des lectures.

Mais c’est surtout dans le domaine de l’édition que les complicités se concrétisent actuellement. Basées en Aveyron, les éditions lamaindonne ont lancé en octobre une collection à partir de photos de famille. «L’idée est d’ouvrir à des histoires personnelles, on a tous des secrets de famille», note l’éditeur David Fourré. Guillaume Geneste, fondateur du laboratoire la Chambre noire, a signé le premier ouvrage, l’autrice Marie-Helène Lafon le second. A Montpellier, les éditions sun/sun ont créé «Flèchettes», une très jolie collection à partir des autochromes et films des Archives de la Planète (1909-1931). Basées à Lille, les éditions Light Motiv publient ensemble femmes photographes et autrices. L’engouement pour ces duos ne doit pas occulter ces points : une simple légende suffit parfois à rendre une photo intéressante et attention à ne pas verser dans l’illustration, un écueil qui fait retomber l’alchimie photo-texte à plat.