On connaît peu d’images de Mary Ellen Mark prises au débotté. Tout simplement car ça n’était pas son truc. Pourtant, là aussi, elle savait y faire, si l’on considère cette gamine sautant d’un muret, sous le regard amusé – et flou – de ses camarades de jeu, dans le Manhattan des années 60. Une scène primitive du quotidien, aussi innocente qu’anonyme, ce qui, là encore, tranchait avec les habitudes de la photographe qui, la plupart du temps, veillait à donner un nom à celles et ceux dont elle croisait le chemin, généralement cabossé, et avec qui elle tissait des liens affectifs souvent durables.
Née à Elkins Park, dans la banlieue de Philadelphie, en 1940, Mary Ellen Mark est morte soixante-quinze ans plus tard à New York, victime du syndrome myélodysplasique, sans que sa disparition ait suscité un profond émoi dans cet univers de la photographie qu’elle avait néanmoins assidûment fréquenté un demi-siècle durant, glanant quantité de récompenses, publiant ses reportages dans des journaux et magazines de premier plan (Life, New York Times, Paris Match, Rolling Stone, Vanity Fair…), exposant dans moult endroits, signant une vingtaine d’ouvrages et laissant derrière elle quelque deux millions de négatifs. Autrement dit, largement de quoi légitimer l’exposition itinérante, présentée cet été à la Maison Doisneau de Gentilly, discret établissement qui