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Libération
Enquête

Qui a écrit «Tartuffe» ? Molière ou Georges Forestier ?

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Début 2022, la Comédie-Française présentait «Tartuffe ou l’Hypocrite» de Molière, version en trois actes censurée en 1664, perdue et reconstituée par Georges Forestier. Ce dernier, qui considère cette pièce comme son adaptation, assigne l’institution culturelle pour «violation de ses droits d’auteur»
Pour restituer la version cachée de «Tartuffe» de Molière (à droite), en restaurer la structure, mais peut-être aussi la réinventer et la rêver, il fallait toute l’érudition et le goût du jeu de Georges Forestier. (Mantovani/Opale, Alamy/Abaca)
publié le 27 octobre 2022 à 18h54

Souvenez-vous, c’était en janvier dernier, la Comédie-Française ouvrait les célébrations du 400e anniversaire de Molière par un événement extraordinaire : la création mondiale d’une version de Tartuffe en trois actes telle que l’avait écrite et voulue Molière, et jouée seulement trois fois, en privé, devant le roi, lors d’une grande fête de printemps dans les jardins de Versailles en 1664. Le souverain applaudit la pièce, avant de la faire interdire deux jours après la première pour des raisons politiques et religieuses, sous la pression des dévots. Durant des siècles, cette première version de Tartuffe, mentionnée dans des lettres, Tartuffe, et parfois l’Hypocrite, pour laquelle Molière s’était battue, avait disparu. Ou plutôt, comme l’a montré Georges Forestier, professeur émérite à la Sorbonne, spécialiste incontesté du Grand Siècle, auteur d’une biographie de Molière qui fait autorité, elle était restée dissimulée sous la pièce en cinq actes passée à la postérité sous le titre Tartuffe ou l’Imposteur, parmi les plus célèbres de Molière, et la plus jouée au Français, loin devant l’Avare.

Pour restituer la version cachée, en restaurer la structure, mais peut-être aussi la réinventer et la rêver, il fallait toute l’érudition et le goût du jeu de Georges Forestier, par ailleurs responsable de l’édition dans la Pléiade de l’œuvre complète de Molière. Début janvier, quinze jours avant la première, Libération rencontrait l’univers