En désencastrant ce qu’on prenait pour un bloc de fange trop compact, en le distinguant et en lui accordant une «polysémie redoutable», les auteurs de la revue Décor, petit pavé dans la mare de 491 pages, redotent le vulgaire de son pouvoir performatif. Ils et elles le revitalisent. Et Emmanuel Tibloux, directeur de l’Ecole des arts décoratifs (Ensad), qui publie la revue, de remarquer très justement en introduction que, souvent, «le potentiel de déclassement du mot n’est activé que pour mieux conjurer la puissance d’effraction qu’il renferme».
Patiemment construit pendant deux ans – ça se sent – ce deuxième numéro s’est laissé contaminer par deux faits politiques majeurs récents : l’élection de Trump et le mouvement des gilets jaunes. Revue d’école d’art oblige, les deux enseignantes et l’étudiante qui ont coordonné ce numéro, Judith Abensour, Elsa Boyer et Rose Vidal, ont choisi une traduction chromatique de ces phénomènes extrêmes : 50 nuances de jaune parmi lesquelles le «gold» des élites financières et politiques surexposées versus le «jaune fluo» d’une France dévalorisée et invisibilisée. Et nous disent ainsi «sa viscosité et sa capacité à tout imprégner». Voici encore des mots qui soulignent que l’on travaille ici «depuis» l’école d’art, et qu’au fond c’est la plasticité des concepts qui importe.
«Kaléïdocopique vulgaire»
Le numéro s’ouvre sur les mystérie