Nous voici à Chicago en 1923, lors d’un dîner avec la troupe mythique du théâtre d’Art de Moscou dirigée par Konstantin Stanislavski. Nous voici au théâtre du Soleil à Paris où onze comédiens de la troupe répètent Notre Vie dans l’art sous la direction de Richard Nelson, metteur en scène et dramaturge américain célébrissime outre-Atlantique, mais, à 73 ans, encore bizarrement inconnu en France, où il est invité pour la première fois, à l’instigation d’Ariane Mnouchkine. Et nous voici assis sur les gradins conçus pour les Ephémères, spectacle chéri entre tous, créé il y a dix-sept ans par le théâtre du Soleil. Les jeux de mémoires, les citations, qu’on les perçoive ou non, forment comme un berceau où le dîner historique et festif, aussi paisible que l’eau qui dort, aussi imprévisible qu’elle, a lieu.
Le théâtre d’Art de Moscou ? Stanislavski ? En 1923, le groupe d’artistes légendaires, qui créa entre autres les chefs-d’œuvre que Tchekhov écrivit pour eux, est torpillé en Union soviétique, vilipendé, car considéré comme bourgeois par le nouveau pouvoir révolutionnaire en place – mais soupçonné de bolchevisme par les Américains. Avec cette nouvelle pièce, d’abord écrite pour le grand metteur en scène russe Lev Dodine avant que