«Isabelle est la synecdoque du théâtre mondial, dit le plasticien et metteur en scène Romeo Castellucci. Elle est l’actrice définitive. Pour une pièce définitive.» Voilà qui est définitivement ronflant. La pièce, c’est Bérénice. L’actrice, c’est Huppert. Synecdoque ? Synecdoque ? Est-ce que j’ai une gueule de synecdoque ? Peut-être lui a-t-elle d’abord dit ça, à Romeo, dans le genre Arletty. Après tout, il est d’abord producteur d’atmosphères. Parenthèse pour ceux qui l’ignorent : une synecdoque, c’est la partie pour le tout, l’espèce pour le genre, la voile pour le navire, Sherlock Holmes pour un détective, et, donc, Isabelle pour le théâtre (mondial). Et les mots de Romeo pour le dire vont bientôt apparaître, en très gros, sur le rideau de fond de scène. Ça fait quoi d’être la synecdoque du théâtre sur une scène de théâtre devant des mots qui rappellent que vous êtes la synecdoque du théâtre ? Et Bérénice, dans tout ça ? «J’aimais, seigneur, j’aimais, je voulais être aimée»… N’est-elle pas de trop, cette reine d’alexandrins ? Et Titus, et Antiochus, et Paulin et les autres ? N’en parlons même pas, puisqu’ils n’y sont pas. Il n’y a qu’elle, la synecdoque, et des silhouettes d’hommes muets et plus ou moins nus qu’on devine, qui apparaissent quand elle disparaît.
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Isabelle est d’abord entrée seule, pâle, menue, nerveuse, teigneuse, sans âge et traversant les âges, vampirique de la scène et du monde, derrière une espèce de brillant et long trapèze ven