«Un, deux, trois, encore une fois, réveillez-moi ces muscles…» Une vingtaine de jeunes danseurs s’étirent avec discipline dans le studio ouvert aux quatre vents. Autour, ce sont les tropiques : un jardin d’Eden qui s’étend à perte de vue, avec des sculptures, des totems, des mobiles en bois, en graines, en pierre, fragiles et plus poétiques les uns que les autres, un lac et des arbres – ceiba, magnolia, manguier – qui s’élèvent, majestueux et graciles, comme les danseurs. Quand la musique s’arrête, le chant des oiseaux prend le relais. Bienvenue à Pontezuela, à 15 kilomètres de la ville fortifiée de Carthagène sur la côte caraïbe, siège de la fondation de danse contemporaine colombienne Colegio del Cuerpo («l’école du corps») qui depuis vingt-cinq ans œuvre à former des «danseurs et des citoyens» et à «éduquer à la paix», selon ses fondateurs, les chorégraphes Alvaro Restrepo (Colombie) et Marie-France Delieuvin (France). Un siège nouveau, puisque le Colegio de Cuerpo n’a jamais eu de lieu fixe lui appartenant, jusqu’à présent.
Il y aura bientôt trois grands studios de danse, des résidences, un réfectoire, une cuisine, un musée, un centre culturel et un jardin botanique, sans compter les vestiaires, l’entrepôt pour les décors et les costumes et le bâtiment administratif en forme de grand lingot en bois déjà en place depuis quelques mois. La friche a été donnée par la mairie de Carthagène il y a treize ans. Mais faute de fonds, et parce que le terrain est