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Critique

Festival d’Avignon : «Absalon, Absalon !», une affaire demeure

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Séverine Chavrier déborde le roman monstrueusement américain de William Faulkner dans une mise en scène où le spectateur réajuste sans cesse son regard.

La pièce se regarde alors comme dans un drive-in. (Alexandre Ah-Kye/festival Avignon)
Publié le 30/06/2024 à 21h06

On avait quitté Séverine Chavrier avec Thomas Bernhard et Ils nous ont oubliés, son adaptation du roman la Plâtrière ; sur scène, une maison-piège au fond des bois bunkérisait un couple dans les secrets de leur guerre conjugale. On la retrouve avec William Faulkner, sa vision du roman Absalon, Absalon (1936), et c’est une nouvelle maison sur le plateau, énorme demeure de style colonial plantée sur un terrain acheté (ou volé ?) en 1833 à un autochtone du Mississippi, trois ans de travaux, avec le nom du proprio Sutpen qui s’affiche monumental en lettres capitales. Une maison-écran dont on aperçoit quelques pièces, chambres, début d’escalier, peut-être un bureau, mais totalement opaque sur son premier étage occulté de draps pour une projection vidéo non-stop qui représente en haut ce qui se passe partout ailleurs. La pièce se regarde alors comme dans un drive-in, à l’exception que les bagnoles sont sur scène.

Différence d’échelle

Résumer Absalon, Absalon ? on ne va même pas le tenter, Séverine Chavrier déborde le roman monstrueusement américain de Faulkner sans jamais chercher à l’illustrer. Et si on n’y comprend rien au début à ces histoires de famille délirantes sur plusieurs générations de fratricides et d’incestes, à l’identité de ce type Sutpen qui baise toutes les filles de la région pour s’assurer un héritier mâle, si on se perd dans les sauts temporels entre la période guerre de Sécession, les récits confessions des descendants, et un exposé universitaire sur la