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Libération
Journal de bord

Festival d’Avignon, jour 19 : on est transporté

Ce mercredi 23 juillet, on part en navette, on s’enferme à Kaboul, on finit à Capri.
«One’s own room inside Kabul», «les Incrédules»
publié le 23 juillet 2025 à 18h31

Ceux et celles qui prennent le taxi ou leur voiture pour aller voir les spectacles en périphérie d’Avignon ratent probablement un des moments les plus forts du Festival : le transport en navette. Déjà, comprendre d’où partent ces cars qui se rendent à perpète est une expédition en soi. Pour le spectacle Décoloniser le dancefloor d’Habibitch, donné au Château de Saint-Chamand, on a suivi, l’air de savoir où l’on allait, deux meneurs de troupes avec une foule indécise et inquiète qui marchait derrière eux. Une fois à l’intérieur, la nature des conversations donne le ton du public. On écoute d’une oreille discrète l’avis d’un spectateur sur l’intervention de Denise Bombardier contre Matzneff chez Bernard Pivot en 1990 et l’on se rassure : c’est sûr, on ne s’est pas trompés de bus. Dans le trajet retour, c’est systématique, on refait le match. Ceux qui ont adoré se chamaillent avec ceux qui ont détesté dans un grand le Masque et la Plume sur roues. Ce sas climatisé offre aussi un contraste étonnant comme à la sortie du spectacle Transfiguration d’Olivier de Sagazan, à la Patinoir : les passagers, encore décoiffés par ce qu’ils venaient de voir, ont commencé à chantonner discrètement les airs diffusés par Radio Nostalgie, comme sur la route des vacances. Difficile de faire plus grand écart, et pour toutes ces raisons, on ne troquerait pour rien au monde contre un taxi tous ces beaux transports en commun.

Les spectacles du jour

On aime

One’s own room inside Kabul de Caroline Gillet et Kubra Khademi. Nous sommes priés de déposer nos sacs et d’enlever nos chaussures. A l’intérieur, face à face, deux rangées de spectateurs assis sur de longues banquettes rouges. La porte se ferme. Une jeune Afghane, qu’on ne verra jamais, témoigne de sa vie depuis la prise du pouvoir des talibans, alors que défilent des images du dehors. Et de cette juxtaposition entre des images et des paroles qui ne se répondent plus naît toute la finesse de cette expérience. Notre critique.

Jusqu’au 24 juillet, sept fois par jour, à la salle des colloques au Cloître Saint-Louis (1 heure). Et le 7 octobre au FIT Festival à Lugano, du 14 au 19 novembre au Théâtre de la Concorde à Paris, avec le Théâtre de la Ville.

Bon, pourquoi pas

Les Incrédules de Samuel Achache. Misant sur l’opéra dans un style qui lui est propre, le metteur en scène offre un spectacle à cheval entre poésie foutraque et fantaisie musicale. Mais les quelques gags savoureux ne permettent pas de rattraper une impression générale de cacophonie. Lire notre critique.

A l’Opéra du Grand Avignon, jusqu’au 25 juillet. Et du 18 au 25 septembre, à l’Opéra national du Rhin, à Strasbourg.

On court le voir dans le Off

Transfiguration d’Olivier de Sagazan. Argile, paille, peinture… La performance fait du corps de l’artiste une sculpture vivante et vibrante au geste désespéré. Lire notre critique.

Le Bizarre de Jean-Yves Ruf et Fabrice Melquiot. Pendant une heure, l’acteur Roland Vouilloz est assis devant nous, de profil. Et l’étrangeté de la langue qu’il porte donne à chaque phrase de la pièce la puissance d’aphorismes.

Le Bizarre, texte de Fabrice Melquiot, mis en scène par Jean-Yves Ruf, avec Roland Vouilloz. Présence Pasteur jusqu’au samedi 26 juillet, à 18 h 15 (durée : 1 heure).

L’interview fournaise

Hervé Vilard. A l’affiche de la pièce Charles Péguy, ta mère et tes copines, j’en ai rien à foutre, mise en scène par Suzanne de Baecque, le chanteur revient sur son expérience de spectateur de théâtre et ses coups de foudre artistique. «Vous saviez qu’on m’avait proposé de jouer Marguerite Duras au théâtre ?»

La réplique

Il paraît qu’il y a des parties du “Soulier de satin” qui sont ennuyeuses exprès pour que les gens puissent dormir.

—  Un mauvais dormeur anonyme

Et demain ?

Jeudi, les Palestiniens Bashar Murkus et Khulood Basel donneront leur pièce Yes Daddy, la rencontre entre un escort et un vieil homme malade d’Alzheimer.

Vendredi, autre rencontre, cette fois de deux passionnants chorégraphes : Marlene Monteiro Freitas et Israel Galvan à la FabricA : RI TE.

Samedi à 22 h 00 à la FabricA, il ne restera plus qu’à écouter Soma, le concert de clôture du Portugais Branko.