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Libération
Journal de bord

Festival d’Avignon, jour 4 : censure et sans parasol

Ce mardi, on rhabille les danseuses, on rejoint les créatures du désert de Radouan Mriziga et on part en transe avec Mette Ingvartsen.
«Delirious Night» de Mette Ingvartsen et «Rien n’a jamais empêché l’histoire de bifurquer» d’après Virginie Despentes. (Christophe Raynaud de Lage et Didier Peron )
publié le 8 juillet 2025 à 19h22

C’est bien beau le festival, les cigales, le bar du In où on n’a pas encore eu le temps de mettre un pied, la maison du Off où on voudrait gratter une carte pour payer moins cher la piscine de la Barthelasse – 13 euros l’entrée, 6 le transat, 3 le parasol. Pour paraphraser l’autre, le calcul est vite calculé. Mais Avignon regarde aussi le reste du monde : Paris par exemple, où Florentina Holzinger, qui présentait son nouveau spectacle Ophelia’s Got Talent à la Villette, a dû, pour obéir aux règles sur la protection de l’enfance, rhabiller fissa ses performeuses lors d’une scène où des petites filles arrivaient sur le plateau. Une censure, exception culturelle française, sachant que la pièce en était à sa 97e représentation depuis 2021. La chorégraphe s’est alors fendue d’une lettre face public pour dénoncer une décision qui «stipule que le simple fait d’être exposé à la nudité a des répercussions sur la moralité et la santé mentale d’un enfant. […] Serait-il possible que la structure “française” ne fasse pas de différence entre un corps féminin nu et la violence ? Un corps nu et le sexe ? […] La protection de l’enfance ici n’est pas notre problème ; [le] problème [est] structurel dans le champ culturel français : il n’existe manifestement aucun discours sur les notions de genre, de sexualité ou d’identité, ce qui signifie qu’il n’existe pas de structure fonctionnelle pour protéger les enfants dans un milieu culturel. C’est l’incapacité de vos autorités à préciser ces notions qui nous conduit ici.» Au festival cette année, la première à se mettre nue aura été Anne Teresa de Keersmaeker dans BREL. Le spectacle dure jusqu’au 20 juillet. Y aura-t-il des enfants dans la salle ?

Les spectacles du jour

On adore

Magec /The Desert de Radouan Mriziga. Dans un ballet à la fois ancré et d’ailleurs, le chorégraphe et danseur marocain Radouan Mriziga s’inspire de la vie dans le Sahara et livre un hommage aux êtres qui ont fait du désert leur milieu à force d’adaptation et de préservation des traditions. Retrouver notre critique.

Jusqu’au 12 juillet au cloître des Célestins. Durée : 1h10.

On aime

Delirious Night de Mette Ingvartsen. La chorégraphe et metteuse en scène danoise signe ici une sarabande de résistance où les danseurs exultent et s’animalisent, ivre d’une rage sans recours. Lire notre critique.

Jusqu’au 12 juillet dans la cour du lycée Saint-Joseph.

On court le voir dans le Off

Rien n’a jamais empêché l’histoire de bifurquer d’après Virginie Despentes. Le spectacle musical mis en scène par Anne Conti donne une nouvelle forme au texte puissant de l’autrice sur nos petites soumissions et surtout sur la possibilité de s’en affranchir. Notre critique.

Jusqu’au 26 juillet à 18h00, à la Scierie (relâche les 8, 15, 22 juillet). Durée : 1h.

L’interview fournaise

Laure Adler. Art du retard, dernier coup de foudre artistique et bonheur de la théâtralisation : l’ex-directrice de France Culture, figure du Festival d’Avignon, se confie pêle-mêle à Libération. «J’adore m’endormir dans les salles de théâtre.»

La réplique

Ce soir, c’est “Bérénice” !

- Ah mais pitié, c’est pas exactement la même histoire que “Phèdre” ?

—  Echange entendu à la boulangerie entre deux marathoniens du Off

L’enquête

«Elle est comme notre gourou.» Ambiance hypersexualisée, critiques sexistes et racistes, climat toxique… Libération a recueilli les témoignages d’ex-élèves du Laboratoire de l’acteur, école parisienne fondée par Hélène Zidi, la fille du cinéaste français. Lire notre enquête.

Et demain ?

Ce mercredi, le metteur en scène syrien Wael Kadour, avec Chapitre quatre, et la metteuse en scène ukrainienne Olga Dukhovna, avec Un spectacle que la loi considérera comme mien, relèveront le pari de «Vive le sujet !», labo de création proposé chaque année par le festival et la SACD : expérimenter deux performances courtes et inédites avec un partenaire de leur choix sur scène.

Quant à Emilie Rousset, elle utilisera à nouveau l’archive documentaire pour cette fois aborder le système judiciaire face à la famille, avec Affaires familiales.

Dans le Off, vous vous confronterez au Problème lapin de Frédéric Ferrer, septième volet de son cycle de vraies-fausses conférences érudites et pince-sans-rire.

Au théâtre des Halles, jusqu’au 26 juillet (relâche les 9, 16 et 23 juillet) à 14 heures. Durée : 1 h 25.