Longtemps elle ne l’avait approché que par des images : les dessins de Picasso, le film inachevé d’Orson Welles et puis la petite sculpture en bois que ses parents avaient rapportée du Mexique et installée dans la maison de campagne de Bourgogne. Don Quichotte, sa lance et son demi-casque, y regarde toujours, songeur, par la fenêtre. «J’en savais très peu de choses en fait, reconnaît Jeanne Balibar quand on la retrouve chez elle à un mois de la première du Quichotte qu’elle jouera au jardin de la rue de Mons à Avignon. J’en gardais l’idée d’un personnage héroïque et ridicule. Avec aussi un gros capital de sympathie, peut-être parce qu’il se fait toujours casser la gueule.» Puis le metteur en scène Gwenaël Morin lui a proposé de tenir le rôle du chevalier à la Triste figure au Festival d’Avignon. Un mois avant le début du festival, voilà comment Jeanne Balibar raconte ses débuts avec le personnage : «Ma première réaction a été de me dire : putain de bordel de merde la chance que j’ai. Dans ce monde terrible où je me sens si perdue, pouvoir travailler pendant des mois sur un personnage qui fuit la réalité, quel privilège ! Ce rôle est venu rencontrer mon propre désir de fuite.» Mais trois semaines plus tard, elle propose qu’on se parle à nouveau : «Alors que le pays a été précipité dans l’im
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Jeanne Balibar au Festival d’Avignon : avec la dissolution, «la puissante utopie portée par Don Quichotte a pris à mes yeux une valeur différente»
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Pour Jeanne Balibar, le rôle de Don Quichotte «est venu rencontrer [s]on propre désir de fuite». (Christophe Raynaud de Lage)
par Sonya Faure
publié le 29 juin 2024 à 16h05
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