Menu
Libération
Monologue

«La Loi du marcheur» : Serge Daney, l’esprit critique

Article réservé aux abonnés
Nicolas Bouchaud, Véronique Timsit et Eric Didry reprennent un spectacle créé quatorze ans plus tôt sur la vie du critique de ciné, ex de «Libé», et réussissent à échapper au biopic. Une pièce toute aussi palpitante qu’à sa création mais qu’on reçoit différemment à l’heure de #MeToo.
Nicolas Bouchaud dans sa pièce «la Loi du marcheur». (Brigitte Enguérand)
publié le 27 mai 2024 à 18h39

Restituer un flux de paroles à la virgule près, une pensée en mouvement, en incarnant un entretien qui prend la forme d’un monologue, en l’occurrence celui qu’adressa Serge Daney, juste avant de mourir du sida, à Régis Debray en 1992. Reprendre ce spectacle partout en France, sur les places de villages de la Drôme ou dans des grandes villes, c’est-à-dire souffler sans fin sur la flamme de cette volée crépitante de mots. Le magnétisme de la Loi du marcheur conçu en 2009 par Nicolas Bouchaud, Véronique Timsit et Eric Didry et porté au plateau par Nicolas Bouchaud repose entièrement sur l’acteur et la complicité du trio. Autrement dit, on peut n’avoir aucune idée de qui est Serge Daney, être sans sympathie particulière à son égard, ne pas s’intéresser plus à la cinéphilie qu’à l’amour des timbres, et être captivé. Ce spectacle ne vieillit pas mais se couvre de sens inattendus avec les années et qu’on ne reçoit plus aujourd’hui comme ne serait-ce qu’il y a huit ans, lorsqu’on l’avait découvert une première fois déjà lors d’une reprise au Rond-Point, à Paris.

Serge Daney ? Un «passeur», se qualifie-t-il, un «ciné-fils» selon l’intitulé de cet entretien, qui exista d’abord sous forme de documentaire en trois volets de chacun une heure diffusée dans Océaniques sur France 3 – autre époque que celle où la télé pouvait consacre