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Libération
Disparition

Le dramaturge britannique Edward Bond est mort

Figure importante du théâtre britannique, l’auteur prolifique et souvent controversé est mort dimanche à 89 ans.
Edward Bond à Marseille, en juin 2003. (Eric Franceschi/Divergence)
publié le 5 mars 2024 à 13h05

«Le monde change, nous ne le comprenons pas. Comment est-il possible dès lors de jouer au théâtre ? A de nouvelles façons de vivre doivent correspondre de nouvelles façons de jouer», confiait le dramaturge britannique Edward Bond à Libération, en octobre 1997. Son monde était sombre, ces textes radicalement pessimistes. Bond était obsédé par le combat entre la corruption et l’innocence, par le mensonge, par Hiroshima et par Auschwitz. Le grand auteur de théâtre est mort dimanche, à 89 ans, a annoncé le Monde. Dans un communiqué daté de la veille, son éditeur français, l’Arche, saluait un «regard acéré» et une plume sans concession.

Né en 1934 dans une famille ouvrière à Londres, sa jeunesse fut marquée par le traumatisme des bombardements allemands de la Seconde Guerre mondiale. A 14 ans, une rencontre fortuite avec le Macbeth de Shakespeare, mis en scène par Donald Wolfit, alluma en lui une passion pour le drame qui ne le quitta jamais. Malgré un manque d’éducation formelle, Edward Bond devint un dramaturge autodidacte, consacrant une décennie à perfectionner son art avant la création de sa première pièce, The Pope’s Wedding, en 1962.

Sa pièce suivante, Saved, créée en 1965, le propulsa sous les feux de la rampe, mais pas forcément pour les raisons qu’il aurait pu espérer. La représentation d’une lapidation d’un bébé dans la pièce provoqua indignation et censure, devenant un cas historique dans la lutte pour la liberté artistique en Grande-Bretagne. Elle sera ensuite mise en scène en France, en 1972, par Claude Régy.

Controverse

La violence devint ensuite un thème récurrent dans l’œuvre de Bond, souvent accueillie avec controverse. Dans sa trilogie des Pièces de guerre, mises en scène (7 heures durant) par Alain Françon au festival d’Avignon en 1994, Bond évoque la dislocation du monde après les bombardements, et ce que la vie aurait pu être sans eux. «Ce que je retiens de la «théorie bondienne», c’est que son théâtre est toujours le lieu du paradoxe : tout acte y est à la fois destructeur et créatif», analysait Françon dans Libé, alors qu’il montait Naître, Si ce n’est toi et la Chaise, à la Colline en 2006 – pièces où les personnages se confrontent à des sociétés policières et oppressives.

L’œuvre d’Edward Bond comprend également des livrets d’opéra et de ballet, des adaptations, des traductions. Il avait aussi coscénarisé pour le cinéma le Blow-Up (1966) de Michelangelo Antonioni.