Au commencement, il y eut l’image. Avalanche de néons, radiations postapocalyptiques, dégueulis cyberpunk ininterrompu. Puis, l’homme se mit à marcher, engoncé sous sa capuche, mine froncée, démarche de gros félin ivre, filmé en très gros plan, souvent réduit à une bouche, des mains, une silhouette. Vinrent ensuite les dialogues, tout en tirades définitives balancées avec le sérieux lénifiant des grandes âmes creuses, méli-mélo poético-inspirant plus lourd que toutes les grues, toutes les tractopelles, tous les excavateurs de l’univers. Enfin, la symbolique fit son entrée, debout sur un char de feu, vidant de pleins sacs d’images grotesques – un steak servi dans un restaurant chic qui laisse échapper une fois découpé une épaisse mare de sang – pour illustrer le schéma argumentaire de l’affaire qui se résume, en, gros à «la vie, poto, c’est pas simple».
Raps lourdauds
Mais ce n’est pas tout. Car si on en restait là, Jungle ne serait que ce dont il a l’air, à savoir un thriller urbain vaguement futuriste, plein de sirènes hurlantes, de gangsters au cœur blessé, de «laisse pas traîner ton fils» et d’«homme libre, toujours tu chériras ton frère, du moins jusqu’à ce qu’il te colle une balle dans le dos en réajustant ses lunettes noires au ralenti».
Non, Jungle c’est aussi une grande évocation désordonnée du lore de la culture urbaine britannique, de l’argot de l’East London aux multiples évolutions musicales de ces vingt-cinq dernières années – grime, UK garage, drum & ba