Le petit homme, pilier de hall, téteur de café froid et mécano émérite, disparaissait vers 20 heures. Il écrasait sa cigarette, s’époussetait le pull (comme si ça pouvait chasser la fumée) et montait rejoindre sa mère (dont il pensait qu’elle ne savait pas pour ses Marlboro). Il saluait les gars et donnait rendez-vous une demi-heure plus tard. C’était assumé : il allait regarder Plus belle la vie et s’en félicitait, sans pouvoir l’expliquer. Du crack télévisé : il avait regardé une fois et s’était retrouvé en laisse. Qu’est-ce qu’il pouvait y faire ? Il redescendait paisiblement quand l’épisode était terminé et retournait au même endroit, comme on revient d’un chaud pissou. La police avait un jour alpagué le petit homme au volant, avec son téléphone. Il demandait à son frère de lui enregistrer l’épisode du soir – il avait alors un joint de culasse en urgence absolue à trifouiller.
Plus belle la vie s’arrête, après dix-huit ans d’histoires à tiroirs et de Marseille modéré et républicain – sans accent, ni signe provençal trop ostentatoire. Des milliers d’épisodes balancés sur le service public, des internautes en transe virtuelle sur des forums, des millions d’audiences accumulées avec une idée imparable : raconter la vie quotidienne (l’apéro, l’amour, le boulot) autour d’un bar parfait, avec un fait divers presque parfait au milieu – comme