Drôle, série feel good de Fanny Herrero, est diffusée à partir de ce vendredi sur Netflix. La créatrice de Dix pour cent, suit quatre humoristes attachants à différents stades de leur carrière et s’applique à montrer le travail derrière les vannes. L’occasion de revenir sur les stand-upeurs ou sitcoms qu’a appréciés Libération : du déjanté trash Eric Andre, à l’obsédée sexuelle Ali Wong, en passant par Seinfeld, mère de toutes les sitcoms et Blanche Gardin et ses problèmes de caca.
«I’m Dying Up Here», micro scopie
La Californie des 70′s vue depuis un temple du stand-up. A la production, Jim Carrey. Los Angeles, 1973. C’est l’époque où, dévalant un Sunset Strip mal famé et dépassant un Château Marmont encore idéalement décati, on se pressait au Comedy Store, le club de stand-up du moment, tenu d’une main de fer par une redoutable dénicheuse de talents nommée Mitzi Shore - qui lancera Robin Williams, Richard Pryor ou David Letterman. Produite entre autres par Jim Carrey, voilà ce que I’m Dying Up Here entend raconter, à travers la vie d’un club inspiré de cette institution et de la petite poignée d’aspirants comiques qui y gravitent. Avec Jim Carrey à la production Sur Canal +
«Jeune et golri», blague à l’âme
On ignorait que le mot de verlan «golri» («rigolo») était toujours en usage. Soyons reconnaissants envers Agnès Hurstel d’en avoir remotivé la lettre et l’esprit, car il faut bien le reconnaître, sa cocréation pour OCS, judicieusement primée au festival Séries Mania cet été, est tout à fait golri. L’histoire est celle d’une stand-uppeuse de 25 ans, Prune, qui tombe amoureuse d’un homme de presque deux fois son âge, déjà papa poule d’une petite Alma de 6 ans. De clown hédoniste et irresponsable, pas même vaguement intéressée par la maternité, la voici promue belle-mère : huit épisodes la regardent porter sa croix. Sur OCS
Festival Séries Mania
«La meilleure version de moi-même» : pour Blanche Gardin, la cerise sur le scato
La série de Blanche Gardin débute là où on avait laissé l’humoriste, derrière la scène de son dernier spectacle, dans une loge où elle s’extrait de cette robe de princesse Disney et de son personnage pour revenir à un monde qui ne gravite plus qu’autour de violentes crampes d’estomac. Devant un corps médical défaillant, la vraie-fausse Gardin élargit le champ des possibles : naturopathie, hydrothérapie, chamanisme… Ce bouchon vient de loin, lui disent ces psychanalystes du caca, et constitue une mise en garde contre l’effet délétère de tous ces rires qu’elle attire dans ses spectacles. Très scato dans ses premiers épisodes, la série transpose le «on n’est pas une femme tout le temps quand on est une femme» des spectacles de Gardin dans le cadre de l’autofiction mockumentaire – ici plus proche de Louie que de The Office. Sur Canal + séries
«Seinfeld», le sitcom-back
Chef-d’œuvre d’écriture, sommet d’absurdité acide, autel à la gloire de la lâcheté, de la pingrerie et de l’ignominie ordinaire, Seinfeld fait partie de ce que la télévision a produit de meilleur dans les années 90 et reste aujourd’hui encore un modèle de sitcom parfaite, à la fois tradi (décors en placo, rires en boîte) et hors format (absolument tout le reste). Sur Netflix
Hannah Gadsby, la charge ironique
«Nanette», son stand-up autour des traumas vécus en tant que femme et lesbienne, devait être le dernier de l’humoriste australienne. Coup de théâtre : elle revient, toujours sur Netflix, avec «Douglas», mélange déconstruit et virtuose de subversion et d’histoire de l’art dynamitée.
Eric Andre, trashé menu
Tout au long de Legalize Everything, sous des dehors bruyants, hurlants, gesticulants, il y a une inventivité extrême dans l’écriture : on y croise un bébé cocaïnomane, un soldat échappé du troisième amendement en manque de fromage en ficelle, des poulets à gros seins génétiquement modifiés, ou Jean Calvin, objet d’une diatribe vigoureuse qui, selon l’humoriste, ne mériterait rien d’autre que d’aller «vider nos coupes menstruelles sur sa tombe». Sur Netflix
«Paper Tiger», Bill Burr est dans une colère blanche
Sous ses dehors gueulards se cache chez Bill Burr un technicien de stand-up hors-pair, convoquant à chaque fois l’analogie ou la tournure de phrase qui fait mouche pour suivre ses idées provocantes. Surtout, on n’est pas loin, dans ce Paper Tiger, de déchiffrer ce qui anime l’humoriste. Pour une fois, sa comédie se retourne sur son personnage d’homme perpétuellement en colère. Sur Netflix
Ali Wong, sex and the cystite
Devenue star, l’Américaine signe un troisième stand-up très porté sur le cul et l’argent. Elle parle beaucoup de chatte, de bite et de fric, souvent dans la même phrase. Mais c’est pour mieux exposer les dynamiques de pouvoir : combien d’hommes se sont-ils fait administrer une fellation par une femme qui gagnait plus d’argent qu’eux ? Pourquoi y a-t-il moins de femmes dans le stand-up ? Peut-elle se permettre de tromper son mari avec le consultant culinaire de son film, mais pas avec Keanu Reeves ? «Je ne veux pas juste l’égalité des salaires, je veux l’égalité dans le plaisir !» crie-t-elle ? Sur Netflix