C’est la fête sur le plateau, espace ponctué de tables qu’on déplace pour danser. Il y a à boire, à manger, un DJ qui chante et des invités, une trentaine de spectateurs naviguent à vue parmi les acteurs de Sur l’autre rive mise en scène par Cyril Teste. Encore Tchekhov. Après sa Mouette en 2021 où l’on entendait une musique lointaine – «La soirée est divine, Ecoutez c’est la fête ! Oui enfin sur l’autre rive surtout» – , Teste cherche d’où vient la bamboche, et la trouve dans cette adaptation libérée de Platonov, première œuvre de jeunesse. Tchekhov a 17 ans, la pièce est refusée, trop de cigarettes, trop d’alcool, il faudra attendre 1921 pour exhumer ce texte fondamental.
Beau gosse voyou
2024, Platonov s’appelle Micha, instituteur marié à Sacha (excellente Haini Wang) aux origines chinoises, étrangère à tout ce qui peut bien se passer, qui n’a pas tous les codes, mais n’en pense pas moins. Sacha c’est nous, les spectateurs de cette performance filmique où les écrans viennent fragmenter et foutre encore plus le bordel dans cette fiesta des illusions perdues. Au centre, Anna Petrovna, une veuve «pas dégueulasse», accent italien, sensuelle et ruinée, un cocktail détonateur dans cette petite société d’amis, relations plus banalement monstrueuses les unes que les autres : «Chacun fait ses petits coups