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Danse

«Sweet Mambo», les éclairs de rage de Pina Bausch

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Le chorégraphe Alan Lucien Oyen remonte l’avant-dernière pièce de la danseuse allemande au Théâtre de la Ville, faisant surgir, dans un contexte post-#MeToo, la violence de l’œuvre initiale.
A l’origine, en 2008, «Sweet Mambo» racontait le désespoir de femmes abandonnées par les hommes infidèles. (Oliver Look)
publié le 25 avril 2024 à 15h20

Seules les femmes parlent chez Pina Bausch, du moins dans Sweet Mambo, son avant-dernière pièce de 2008, remontée – c’est le cas de le dire – par le chorégraphe Alan Lucien Oyen. Remontées, les six femmes de Pina Bausch le sont, et se font entendre avec une force qu’on n’avait pas mesurée à l’époque ; c’est peut-être l’effet #MeeToo, ou la nouvelle direction artistique qui active la violence d’une œuvre où les danseuses prennent la parole. Encore faut-il bien les écouter. Alors, cette fois, on note. Tout. Leur rage : «Vous n’avez pas encore vu comme je peux disjoncter. Je pourrais presque tuer quelqu’un. Je suis complètement tarée, complètement à côté de la plaque.» Plus loin : «Si vous avez un problème, n’importe quel problème, je peux crier pour vous.» Ce sont des histoires de chute : «La vie, c’est comme le vélo, ou tu roules ou tu tombes», répète deux fois Nazareth Panadero. Et puis, il y a ce «Comment ça va ? Bien. Morte mais bien», prolongé quelques minutes plus tard de «Lentement. Ça va mieux, mais lentement». On les regarde crier du fond de la gorge : Nazareth, encore elle, au micro cette fois pour être bien entendue, et Julie Ann Strarzack qui hurle : «LET ME GO» quand elle se voit empêchée de traverser la scène, une fois, deux fois, dix fois, systématiquement repoussée par deux hommes qui la remettent… à sa place ? Et surtout on ne peut qu’être saisi devant l’horreur de ce qu’elles nous confient face public, quand el