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Lyrique

Un «Don Quichotte» ingénieux et poétique à Bastille

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La nouvelle production de l’opéra de Massenet, d’après le roman fondateur de Cervantès, est dirigée amoureusement par Patrick Fournillier, mise en images avec finesse par Damiano Michieletto, et portée par une belle distribution.
La bonne surprise, c’est la mise en scène, élégante et ingénieuse, de Damiano Michieletto qui livre là son quatrième spectacle pour l’Opéra de Paris. (©Elena Bauer - OnP)
publié le 15 mai 2024 à 16h05

Moins connu et moins aimé que son Werther ou que sa Manon, le Don Quichotte de Massenet gagne à être réécouté tant il regorge de pages d’orchestre admirables et d’airs et de chœurs estimables. Il ne faut donc pas manquer la nouvelle production actuellement proposée à Bastille, digne des meilleures maisons et festivals européens. La première surprise vient de la fosse. En lieu et place du russe Mikhaïl Tatarnikov annoncé, c’est le vétéran Patrick Fournillier qui pilote l’orchestre ; et cela avec une vigueur, une passion, une manière d’exalter la science de l’harmonie et des timbres, de Massenet, qui subjuguent et captivent tout au long de la soirée. La deuxième bonne surprise, c’est la mise en scène, élégante et ingénieuse, de Damiano Michieletto qui livre là son quatrième spectacle pour l’Opéra de Paris. Il fait du chevalier errant de Cervantès un intellectuel comblé mais en proie à une insondable mélancolie.

Timbre de diamant noir

Passé le chœur introductif, les jeunes brigands menaçants du roman s’immiscent comme par magie dans son salon ivoire et pistache, aussi chic qu’aseptisé, surgissant d’une bibliothèque, d’un sofa, jusqu’à ce que le mur du fond cède, ouvrant sur sa psyché. Est-ce l’effet de l’alcool ou des tranquillisants ? Voilà que le bel hidalgo grisonnant hallucine des manèges de chevaux felliniens, des fêtes de fin d’année au lycée où l’on dansait le rock et le twist, des silhouettes hiératiques costumées pour le flamenco, admirablement découpées par les lumières