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Libération
Roman

«La Mélancolie de celui qui vise juste» de Lewis Nordan

Aujourd’hui, les espoirs et tourments des habitants d’Attrape-Flèche.
par Richard Godin
publié le 18 juillet 2021 à 19h22

Vivant, il est surnommé Hydro, «l’amateur de tartes aux pêches à grosse tête», du fait de son hydrocéphalie. Il a une vingtaine d’années et habite avec son père, Monsieur Raney, dans une cabane en plein bayou du Mississippi. Mort, il reprend son véritable nom, Ramon Fernandez. Dans le bar Chez Jésus, il retrouve sa mère, qui n’a pas survécu à l’accouchement. Entre-temps, il a tué deux jeunes dans une station-service avant de se suicider au milieu de la nuit, en se noyant dans le lac Roebuck où vivent les dauphins et les marsouins.

Il faut dire qu’à Attrape-Flèche, la vie est un grand vide que chacun essaye d’oublier. On s’occupe avec les flingues et comme tous les habitants du Mississippi, on cherche à percer dans le show-business. «Pourquoi ?» se demande Monsieur Raney. «Pour que le reste d’entre nous fasse pas la même chose qu’Hydro, j’imagine», lui répond Monsieur Roy, le facteur.

Cette nouvelle traduction du livre déjà paru en 1997 aux éditions Rivages développe une histoire à la fois drôle et tourmentée, où l’humanité ressort dans les fêlures et les espoirs des personnages. Parmi eux, Morgan l’as de la gâchette, adopté par la femme vaudoue, le Prince des Ténèbres, gérant du funérarium passionné d’art dramatique, le docteur McNaughton qui ferme les yeux sur les infidélités de sa femme alcoolique. Rythmé aux bruits de la vie et des chansons dans le style caractéristique de Lewis Nordan (1939-2012), tous vont remettre en question leurs responsabilités et chercher enfin «la vie réelle, la fin du désespoir».

La mélancolie de celui qui vise juste de Lewis Nordan, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Marie-Odile Fortier-Masek, Monsieur Toussaint Louverture, 288 pp., 19 €.