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J'ai testé pour vous

Visites sportives du Louvre : qu’est-ce qu’on se fait suer !

Olympiade culturelle: Place aux Jeux artistiquesdossier
Pendant tout le mois de mai, le musée a proposé des visites sportives et dansantes. L’occasion d‘y sauter, courir, crier… bref, tout ce qui est d’ordinaire interdit. Mais aussi de profiter d’un face à face privilégié avec les œuvres.
On ne traverse aucune salle de peinture, où la sueur est persona non grata.
publié le 30 mai 2024 à 13h03

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On plaint la Vénus de Milo, ce n’est pas un scoop. Pas de bras, la tuile hein. Mais en ce matin de mai, on compatit pour de vrai : ne pas pouvoir se secouer de tous ses membres (zygomatiques inclus) à l’invitation du coach Salim Bagayoko dont l’énergie déborde de la salle des Cariatides voisine, c’est sacrément rude. Parce que oui, on a dansé, couru, chanté, crié au Louvre. Tout ce qui est absolument interdit dans un musée sous peine de se faire virer était, en mai, au programme d’une «visite sportive» commandée au chorégraphe Mehdi Kerkouche par la direction de l’institution, bien décidée à coller à cet été olympique.

Des siècles de chuchotements et puis : Michael Jackson en sursaturé, le jogging à petites foulées entre les statues – on ne traverse aucune salle de peinture, la sueur est persona non grata –, cris et applaudissements en rafale dignes de la fin d’un cours de CrossFit. Découvrir le Louvre à l’aube sans visiteur est déjà un sacré privilège. Mais ce face à face entre objets inanimés et corps en mouvement confine parfois au magique, modifiant perspective (il est conseillé de s’approcher des œuvres tout tout tout près) et perception. Quelle était la probabilité pour que la Jamaïque et la Mésopotamie se croisent, faisant découvrir sous un tout autre jour les Lamassus, ces majestueux taureaux ailés sculptés du VIIIe siècle avant J.-C. qui veillent sur la cour Khorsabad ? Au cœur de cette ronde d‘albâtre hiératique, on enchaîne les déhanchés caribéens de dancehall. Et ça fonctionne et tout le monde en redemande.

«Profitez de ce moment unique», philosophe pourtant le cheerleader en chef, Jérémie. Carpe diem, traduirait in petto l’habitué lettré des lieux. «Right here, right now», résume Fatboy Slim, dont l’hymne planétaire ambiance une séance de tortu… euh, cardio – squats, burpees et walking lunges (ceux qui savent, savent… et pleurent) – le long des murs de l’enceinte Charles V. Inspire, expire, yoga et chien tête en bas dans la cour Marly pour boucler la boucle : «Restez les yeux grands ouverts pour une fois, fixez une statue, c’est votre statue aujourd’hui. Une statue du Louvre, mais à vous.» Il est 9 heures, des hordes de Japonais et d’Américains envahissent l’espace. Les escaliers du métro achèvent nos cuisses en feu et c’est l’épiphanie : la Vénus de Milo, elle au moins, n’aura pas de courbatures demain.