Comment sortir de l’impasse constitutionnelle européenne ? Si le sujet vous passionne, il angoisse les dirigeants de l’Union qui ne voient toujours pas de solution évidente pour rebondir. Pour la première
fois, un chef de gouvernement, en l’occurrence le Premier ministre danois, le libéral
Anders Fogh Rasmussen
(à droite de Jean-Claude Juncker sur la photo), estime qu’il faut arrêter de tourner autour du pot : la seule option réaliste, a-t-il expliqué vendredi dans un discours prononcé à l’Université de Copenhague, est de «
parvenir à un accord sur la négociation d’un nouveau traité »
.
Pour lui, il est <em>« peu réaliste que l'on trouve une solution au problème français et néerlandais et que le processus de ratification se poursuive »</em> en l'état. Mais comme il y <em>« a peu de chances qu'il y ait un accord pour renoncer à la Constitution européenne »</em>, bientôt ratifiée par quinze Etats membres, «<em> et poursuivre la coopération sur la base du traité de Nice »</em>, un traité que tout un chacun juge catastrophique, la seule solution réaliste est de remettre l'ouvrage sur la table. Cependant, il estime qu'il est douteux que les Vingt-cinq se précipite dans cette voix : il est probable que le Sommet de juin décidera de prolonger la <em>« période de réflexion »</em> décidée en juin 2005, au lendemain du double « non » franco-néerlandais.
Il s’agit d’une façon élégante de dire que rien ne sera possible avant le départ de Jacques Chirac et l’installation de son successeur à l’Elysée, au printemps 2007. A ce moment, surtout si la France se donne un Président europhile (Ségolène Royal et non Nicolas Sarkozy empêtré dans son
[ «directoire des six grands» ]
), tout sera réuni pour une relance de la construction communautaire. C’est du moins l’analyse que l’on fait à Bruxelles, après l’élection de
Romano Prodi
en Italie qui a quelque peu rompu la morosité ambiante : avec Angela Merkel en Allemagne (photo ci-dessous), on retrouvera un triangle qui ne sera pas sans rappeler celui formé par François Mitterrand, Helmut Kohl et Giulio Andreotti, les trois accoucheurs du traité de Maastricht, en décembre 1991. Seul hic : José Manuel Durao Barraso, l’actuel président de la Commission, n’a pas les qualités de son prédécesseur Jacques Delors…
Le problème, dont chacun a conscience, est qu’il ne sera pas aisé d’aboutir à un texte qui satisfasse ne serait-ce que les Néerlandais et les Français : si ces derniers ont surtout
voulu protester contre la situation de l’emploi et le supposé « ultralibéralisme » du projet, les premiers, eux, y ont surtout vu un risque pour la souveraineté nationale et ont manifesté leur refus de continuer à payer pour les plus pauvres (voir l’étude publiée par la revue Futuribles dont j’ai déjà parlé). Le compromis –car il faudra que ce soit un compromis acceptable par vingt-sept pays- risque une nouvelle fois de mécontenter tel ou tel pays…