Le sommet « informel » de Lahti n’a pas attiré les foules journalistiques des grands jours, comme c’était prévisible : une après-midi seulement de débats à vingt-cinq chefs d’Etat et de gouvernement, des sujets techniques (énergie, innovation et un peu d’immigration), une réunion organisée dans une toute petite ville sans charme située à 110 kilomètres au nord est d’Helsinki par 3° C, rien n’a été fait pour déchaîner les passions médiatiques. Heureusement que le dîner avec Vladimir Poutine, prévu en clôture de ce Conseil européen des chefs d’Etat et de gouvernement, a réveillé in extremis l’intérêt des rédactions vu l’actualité sanglante de ce pays (voir mon
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de ce jour).
Ces migrations journalistiques font l’objet de toutes les attentions des différents gouvernements. Le journaliste qui veut suivre un sommet, qui implique le déplacement du chef de l’Etat ou du Premier ministre, a deux possibilités : soit organiser son voyage seul, soit utiliser les infrastructures de son gouvernement. Pour un Conseil comme celui de Lahti, mieux vaut se laisser embarquer par l’organisation impeccable des services de la présidence de la République française.
Quelques semaines avant la réunion (c’est vrai pour les Conseils Européens mais aussi pour tous les déplacements du chef de l’Etat), les journalistes intéressés, qu’ils soient Français ou non, peuvent s’adresser à l’Elysée et réserver le vol ou l’hôtel ou les deux. Tout cela est payant, mais le prix du billet d’avion est particulièrement compétitif, l’avion affrété par la présidence de la République appartenant à l’armée française (photo). L’hôtel a été choisi par les services de la présidence au cours du voyage exploratoire préparant le déplacement du Président de la République (de la sécurité à l’hôtel en passant par les déplacements). Ce service est dirigé d’une main de fer par Evelyne Richard, dont on signale la présence à l’Elysée depuis la présidence de Pompidou.
Le service à bord de l’avion est digne d’une Première classe sur Air France et est assuré par du
personnel militaire d’une particulière efficacité. La cuisine et les vins sont à se damner. Le placement à bord est subtil : les sièges correspondant à la première classe sont attribués nominativement, le reste des journalistes et les services de sécurité se répartissant en classe affaire et économique (mais le service reste le même). Chacun a droit à son tour à la Première, mais pas toujours : sachez que cette fois-ci, j’étais en Première à côté du nouveau porte-parole adjoint de l’Elysée (qui occupe toujours le siège 1A),
Hugues Moret
, que je ne connaissais pas, ce qui a permis de briser la glace… Ce n’était évidemment pas un hasard.
Cette fois-ci, l’avion était loin d’être plein : vingt-quatre journalistes et photographes auxquels s’ajoutent les techniciens télés et le staff de l’Elysée. A l’arrivée, des bus attendent les journalistes qui sont convoyés à leur hôtel et, le lendemain vers le centre de presse. Les formalités policières, c’est un autre avantage de ce type de voyage organisé, sont limitées au strict minimum : « la presse présidentielle voyage ». Soigner les journalistes n’est pas forcément un bienfait perdu: accompagnés, chouchoutés, brieffés, ils se montreront peut-être moins agressifs. Même si ce n’est pas un pari gagnant à tous les coups, il vaut le coup d’être tenté.
Tous les pays européens ont ce type d’organisation mais avec leurs spécificités : les Belges ne payent pas l’avion, les Portugais ne payent rien, les Britanniques, eux, voyagent à bord d’un avion de British Airways loué pour l’occasion, les Allemands, eux, n’organisent en général le déplacement de leurs journalistes que pour les voyages hors de l’Union, etc. « J’ai voyagé avec les Allemands, les Français et les Britanniques. La palme de la qualité revient indiscutablement aux Français », juge un confrère allemand. Les Belges, eux, jaloux, constatent qu’ils n’ont droit qu’à quelques boissons dans leur avion.