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Blog «Coulisses de Bruxelles»

Déficit: Paris tancé par Bruxelles

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La France va fêter de la pire manière qui soit, le dixième anniversaire de l’euro : en 2009, elle sera en effet le seul pays de la zone euro dont le déficit public va atteindre voire crever le plafond de 3 % du PIB, limite maximale fixée par le Pacte de stabilité et de croissance. La Commission a donc décidé de lui envoyer, hier, un « conseil de politique économique » (vous pouvez le télécharger en français) afin de l’encourager à serrer la vis budgétaire avant qu’il ne soit trop tard. Un conse
DR (Monasse/europolitiquephoto.eu)
publié le 29 mai 2008 à 16h31
(mis à jour le 16 février 2015 à 16h13)

La France va fêter de la pire manière qui soit, le dixième anniversaire de l’euro : en 2009, elle sera en

effet le seul pays de la zone euro dont le déficit public va atteindre voire crever le plafond de 3 % du PIB, limite maximale fixée par le Pacte de stabilité et de croissance. La Commission a donc décidé de lui envoyer, hier, un

« conseil de politique économique »

(vous pouvez le

en français) afin de l’encourager à serrer la vis budgétaire avant qu’il ne soit trop tard. Un conseil qui s’apparente fort à un blâme, la Commission n’ayant jamais caché son scepticisme face aux diminutions d’impôts décidées l’année dernière par le Président de la République, même si elle encourage Nicolas Sarkozy à poursuivre les réformes qu’il a engagées.

C’est la première fois que cette procédure du « conseil », moins lourde que celle de « l’alerte précoce », est mise en œuvre depuis la réforme du Pacte de stabilité en 2005. Bruxelles espère ainsi que les autorités hexagonales pourront en tenir compte lors de la préparation du budget 2009. Car il y a urgence, tous les clignotants ayant viré au rouge : le déficit plonge (-2,7 % du PIB en 2007, soit 0,3 point de plus que prévu, -2,9 % en 2008 et 3 % en 2009), la dette augmente à nouveau (64,2 % en 2007, 64,4 % en 2008, 65,1 % en 2009 alors qu’elle n’était que de 40 % au moment de la signature du traité de Maastricht en 1992 comme le rappelle méchamment la Commission), un ratio de dépenses publiques rapporté au PIB de 52,5 %,

« soit le plus élevé de la zone euro »

. Et pour couronner le tout, une croissance qui ralentit

fortement. Joaquin Almunia, le commissaire chargé des affaires économiques et monétaires, estime que la divine surprise du premier trimestre 2008 (+ 0,6 %) ne devrait pas se répéter. Autrement dit, la croissance française ne devrait guère dépasser 1,6 % cette année et 1,4 % l’année prochaine comme prévu alors que la France espère toujours entre 1,7 et 2 % en 2008 et entre 1,7 % et 2,25 % en 2009…

Si la Commission salue les « réformes structurelles » mises en œuvre par Nicolas Sarkozy, « bon nombre d'entre elles sont encore aux premiers stades de leur mise en œuvre ou en discussion ». Autrement dit, elles n'auront d'effet sur la croissance « qu'à moyen terme ». Bref, si le gouvernement « n'assainit » pas rapidement son budget, le déficit pourrait parfaitement crever le plafond des 3 %, comme il l'a déjà fait en 2003 et en 2004. Trois fois en dix ans cela fait désordre pour un pays qui revendique en permanence un « gouvernement économique » de la zone euro alors qu'il est incapable de tenir les cordons de la bourse à domicile… Pour la Commission ; il faut donc « combiner le processus de réforme structurelle en cours à l'assainissement nécessaire des finances publiques », en particulier en renforçant « le contrôle de l'efficience des dépenses et en poursuivant la réforme et la rationalisation du système de sécurité sociale, en particulier dans le secteur des soins de santé ».

Ce « conseil » envoyé à la France souligne à quel point Paris a perdu toute crédibilité dans le domaine économique. Ce n'est pas un hasard si le chef de l'État a renoncé à lancer une initiative dans ce domaine lors de la présidence française de l'Union qui débutera le 1er juillet :  <em>« la meilleure façon de foutre en l'air la présidence, c'est de lancer une initiative sur l'euro, la Banque centrale européenne et la gouvernance économique »,</em> reconnaît-on à l'Élysée.

(photos: Thierry Monasse)