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Libération
Blog «Coulisses de Bruxelles»

La guerre du gaz propulse le marché unique de l'énergie

« Les observateurs européens sont sur place et se les gèlent en regardant des compteurs qui ne tournent toujours pas », a regretté, cet après-midi, Paul Magnette, le ministre belge du climat. Car, in extremis, dimanche soir, Moscou a décidé de ne pas rouvrir les robinets des gazoducs qui traversent l’Ukraine à destination de l’Union européenne et des Balkans lundi matin, comme elle s’y était engagée. Cependant, « la partie russe nous a promis qu’elle rouvrirait les robinets, s’il n’y a pas d’ob
DR (Monasse/europolitiquephoto.eu)
publié le 12 janvier 2009 à 22h20
(mis à jour le 16 février 2015 à 16h13)
« Les observateurs européens sont sur place et se les gèlent en regardant des compteurs qui ne tournent20090108_energy_13 toujours pas »

, a regretté, cet après-midi, Paul Magnette, le ministre belge du climat. Car, in extremis, dimanche soir, Moscou a décidé de ne pas rouvrir les robinets des gazoducs qui traversent l’Ukraine à destination de l’Union européenne et des Balkans lundi matin, comme elle s’y était engagée. Cependant,

« la partie russe nous a promis qu’elle rouvrirait les robinets, s’il n’y a pas d’obstacle à 8 heures mardi matin »

, a affirmé hier soir Martin Riman, le ministre tchèque de l’énergie. Il refuse cependant de se réjouir trop tôt :

« il faut être réaliste, car au cours des dix derniers jours, nous avons eu beaucoup de faux espoirs

». En attendant, les pays d’Europe centrale et orientale ainsi que les Balkans vont continuer à souffrir du manque d’énergie, un minimum de 36 heures étant nécessaire pour que le gaz arrive à nouveau à ses destinataires. La Slovaquie et la Bulgarie envisage même de relancer les réacteurs nucléaires de type Tchernobyl que l’Union européenne les a contraint à fermer, à la grande fureur de leurs voisins... (sur la photo Alexeï Miller, le patron de Gazprom)

Les vingt-sept ministres de l'Énergie de l'Union se sont retrouvés à Bruxelles, aujourd'hui, pour une réunion extraordinaire afin de faire le point sur cette guerre du gaz qui s'éternise et « étudier les mesures à mettre en place pour que nous ne nous retrouvions plus dans une pareille situation à l'avenir », comme l'a expliqué Marin Riman qui présidait la réunion. Car, a-t-il souligné, l'embargo russe qui frappe l'Union européenne « a nui à la crédibilité et à la fiabilité » de la Russie et de l'Ukraine, pays de transit.

Et les derniers rebondissements de cette crise n'ont pas amélioré leur réputation respective. Tard, dimanche soir, le président russe, Dimitri Medvedev annonçait ainsi que l'accord obtenu, samedi, par la présidence tchèque de l'Union sur le déploiement en Ukraine et en Russie d'observateurs européens, russes et ukrainiens chargés de s'assurer qu'aucun m3 de gaz ne serait détourné au profit de Kiev était « nul et sans valeur ». Kiev a, en effet, rajouté une mention manuscrite renvoyant à une déclaration qui affirmait qu'elle n'avait plus aucune dette envers Gazprom et n'avait pas volé une partie du gaz en transit comme l'en accuse Moscou… À 10 heures, ce matin, le porte-parole de Vladimir Poutine, Dmitry Peskov, a organisé une conférence de presse téléphonique afin d'expliquer aux médias occidentaux la position russe : « il faut que les trois parties resignent l'accord sans cette déclaration (…) inconnue des Russes ».

En début d’après-midi, le vice-président de Gazprom, Alexander Medvedev, annonçait de Bruxelles que, finalement, tout le monde avait resigné l’accord sans ladite déclaration... Reste qu’un

« autre problème se dessine »

, comme l’a reconnu Dmitry Peskov, celui

« du gaz technique nécessaire pour assurer le transit. L’Ukraine insiste que ce gaz naturel soit être fourni par le fournisseur russe, par Gazprom, et selon nous ce n’est pas le cas ».

Bref, une nouvelle mauvaise surprise n’est pas à exclure.

En tout état de cause, cette crise aura permis de « faire avancer des dossiers qui n'avançaient pas beaucoup », c'est un « grand classique de l'Union », s'est réjoui Paul Magnette. Les Vingt-sept se sont ainsi engagés dans la réalisation d'un marché unique de l'énergie afin de réduire la dépendance énergétique à l'égard de la Russie. Cela va de la transparence dans la gestion des flux et des stocks à l'amélioration de l'interconnexion en passant par la possibilité d'inverser les flux voire une politique d'achat commun comme le demandent les Belges. « On n'est plus dans la diplomatie énergétique nationale », a estimé Paul Magnette : « c'est une peu comme la monnaie unique qui a été précédée par le système monétaire européen ».

(Photos: Thierry Monasse)