Aujourd’hui, dans l’Union, seuls trois pays appliquent le secret bancaire : l’Autriche, la Belgique et le
Luxembourg. Mais, plus grave, de petits États nichés au sein de l’Union sans en être membres sont de véritables « trous noirs fiscaux » : le Liechtenstein, Monaco, Andorre, la Suisse. Pis : des États membres abritent de véritables paradis fiscaux, comme la Grande-Bretagne (avec les îles anglo-normandes ou les îles Caïmans). Or, avec la crise bancaire et financière, le maintien de ces situations qui favorisent l’évasion et la fraude fiscale est devenu intenable, l’absence de transparence étant justement l’une des causes de la crise.
Nicolas Sarkozy, lors de son intervention radio télédiffusée de jeudi dernier, a de nouveau pris pour cible les « paradis fiscaux » : « cela m'amènera à revoir nos relations avec Andorre, à poser la question de nos relations avec Monaco, qui par ailleurs n'est pas un paradis fiscal, mais enfin il y a des choses que nous devons préciser (…) Également, cela nous amènera à poser un certain nombre de questions à nos voisins luxembourgeois ». J'avoue qu'affirmer que Monaco n'est pas un paradis fiscal m'a sidéré alors qu'il s'agit de l'un des États jugés par l'OCDE comme non coopératifs, à la différence du Luxembourg. Et l'oublie de l'Autriche, de la Belgique et de la Grande-Bretagne dans l'énumération du chef de l'État est tout aussi étonnante.
Depuis le début de la crise, la Suisse et le Luxembourg envoient des signaux d'ouverture. Ainsi, mardi dernier, Jean-Claude Juncker, le premier ministre luxembourgeois, a affirmé que son pays « était prêt à discuter » du secret bancaire : « ce débat ne sera pas dramatique ». En Suisse, on sait que le secret bancaire ne tiendra pas longtemps, surtout après les scandales à répétition qui ont entaché la réputation de ses banques, tout comme les avantages fiscaux accordés aux étrangers. Ce dimanche, Zurich a d'ailleurs fait un pas vers l'Union en abolissant par référendum les forfaits fiscaux (très avantageux) accordés aux milliardaires étrangers qui y résident.
Lundi dernier, la Commission a proposé d'améliorer la coopération entre les autorités fiscales européennes afin de lutter contre la fraude et l'évasion fiscale : si les directives proposées sont adoptées (à l'unanimité), aucun État ne pourra plus opposer le secret bancaire lors d'une demande d'assistance fiscale émanant d'un autre État membre. Mais elle n'a pas encore osé proposer la levée pure et simple dudit secret… Les États risquent, encore une fois, de lui bruler la politesse.