
Un service minimum. D’autant qu’immédiatement après, il a taclé le président de la Commission : « je me suis permis de dire au dîner hier que ce soutien ne devait pas être compris comme un message d’immobilisme et que ça devait changer. De ce point de vue, le texte de M. Barroso me semble marquer une inflexion intéressante sur les idées que j’ai entendu défendre jusqu’à présent, y compris sur la nécessité d’une grande politique agricole commune ». Si on décrypte les propos présidentiels, il semble bien dire que Barroso I ne l’a guère satisfait et qu’il attendait de Barroso II un peu plus de volontarisme, entendez une meilleure prise en compte des intérêts franco-allemands…
Bref, rien dans son bilan n’a particulièrement frappé le Président de la République, seuls sa souplesse et son entregent l’ayant séduit… C’est bien là la qualité essentielle de José Manuel Durao Barroso qui explique le soutien unanime du Conseil : il s’est comporté durant cinq ans comme le fidèle exécutant des désidératas des États, proclamant lui-même qu’il était à leur service. Ce qui plait dans Barroso, c’est qu’il ne dérange personne par des initiatives intempestives et aucun pays n’a envie d’un hyperactif à la tête de la Commission. Il reflète l’état de l’Union aujourd’hui : des États qui rechignent à aller plus loin dans l’intégration et qui, sous les coups de boutoir de la crise, sont plutôt tentés de démanteler le marché unique…
Une autre raison du soutien dont jouit Barroso parmi les chefs d’État et de gouvernement est que
le candidat du PPE n’a pas d’alternative déclarée, comme l’a souligné Nicolas Sarkozy : « Je n’ai pas vu une solution alternative qui remplirait le même consensus ». J’ai donc lancé, hors micro : « Alain Juppé ». Ce qui a déclenché son hilarité: « si c’est le candidat de Libération,… Ça marche l’ouverture… » Plus sérieusement, « ce n’est pas à la France d’aller rompre le consensus autour de la table ». Le Président a aussi avancé un autre argument : « je ne pense pas que l’Europe a besoin en plus aujourd’hui d’un conflit entre les différentes institutions. Je ne pense pas que c’est ce que les Européens attendent de nous. Il y a du chômage, il y a une crise ». Mais on peut aussi se demander si en période de crise, il ne faudrait pas à l’Union un capitaine capable de voir loin et qui a le courage politique de s’opposer à des États tentés par le chacun-pour-soi.

Photos: JQ et Thierry Monasse