
Sa mission était délicate, voire impossible : sans réels moyens politiques (il était en même temps secrétaire général du conseil des ministres, un poste administratif), il devait naviguer entre les politiques étrangères contradictoires des États membres. Solana ne pouvait se faire entendre à l’étranger que lorsque les Vingt-sept parvenaient à une position commune, ce qui est encore relativement rare. Son génie a été de ne jamais déplaire à des États membres soucieux de préserver leur souveraineté. Sa capacité à avaler des couleuvres et son sabir marmonné à voix basse, mélange d’espagnol, d’anglais et de français, participaient de la capacité du personnage de donner l’impression à tous ses interlocuteurs qu’il abondait dans leur sens…
Son successeur disposera, lui, de réels moyens, du moins si le traité de Lisbonne entre en vigueur. Doté d’un « service diplomatique commun », il sera à la fois président du Conseil des ministres des Affaires étrangères et vice-président de la Commission en charge des relations extérieures : il disposera donc des moyens financiers nécessaires à sa mission. Il sera plus proche d’un véritable ministre des affaires étrangères de l’Union (mot qui figurait dans le défunt projet de Constitution européenne et que les Britanniques ont fait disparaître du traité de Lisbonne) que d’un simple « Haut représentant », simple secrétaire à la disposition des Vingt-sept.
Photo: Thierry Monasse