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Libération
Blog «Coulisses de Bruxelles»

Barroso joue sa survie

José Manuel Durao Barroso joue son avenir politique en cette rentrée de septembre. Il n’a plus que quelques jours pour convaincre une majorité de députés européens de le reconduire à la tête de la Commission européenne pour un second quinquennat, le 15 septembre, lors de leur session plénière de Strasbourg.  Il sait que l’issue de la bataille s’annonce incertaine : soutenu par l’ensemble des vingt-sept chefs d’État et de gouvernement de l’Union, conservateurs, libéraux et socialistes confo
DR (Monasse/europolitiquephoto.eu)
publié le 1er septembre 2009 à 19h57
(mis à jour le 16 février 2015 à 16h12)
20090518 JM Barroso 14 José Manuel Durao Barroso joue son avenir politique en cette rentrée de septembre. Il n’a plus que quelques jours pour convaincre une majorité de députés européens de le reconduire à la tête de la Commission européenne pour un second quinquennat, le 15 septembre, lors de leur session plénière de Strasbourg.  Il sait que l’issue de la bataille s’annonce incertaine : soutenu par l’ensemble des vingt-sept chefs d’État et de gouvernement de l’Union, conservateurs, libéraux et socialistes confondus, l’ancien premier ministre portugais suscite beaucoup moins d’enthousiasme au sein d’un Parlement européen qui lui reproche la maigreur de son bilan et la politique de dérégulation qu’il a pratiquée entre 2004 et 2009.
Durant l’été, il a donc préparé un programme pour les cinq prochaines années afin de répondre notamment aux exigences des groupes socialiste et libéral-démocrate qui lui ont adressé en juillet dernier une série de demandes avant de se prononcer. En particulier, ces groupes veulent que Barroso se montre davantage volontariste face à la crise financière et économique. Ces « lignes directrices politiques », qui n’engageront que lui et non l’ensemble de la future Commission qui ne sera nommée qu’à la fin du mois d’octobre, seront envoyées cette semaine aux présidents des sept groupes politiques de l’Europarlement. Ensuite, Barroso sera entendu à huit-clos par les députés les 8 et 9 septembre. Enfin, le 10 septembre, la conférence des présidents de groupe décidera ou non d’inscrire le vote d’investiture à l’ordre du jour de la session plénière de la mi-septembre. À l’heure actuelle, seuls les groupes conservateur (PPE, parti populaire européen, dont est membre l’UMP), eurosceptique (ECR, conservateurs et réformistes européens) et europhobe (EFD, Europe des libertés et de la démocratie) soutiennent ce calendrier, ce qui est largement insuffisant.
Les autres groupes politiques estiment, pour l’instant, qu’il n’est nul besoin de se précipiter. Les Verts et la20090706 Barroso 03 gauche radicale (GUE) sont viscéralement opposés à la reconduction de cet « ultralibéral » alors que les socialistes et les libéraux-démocrates sont divisés : à défaut de le faire trébucher, ils espèrent au moins obtenir un maximum de concessions. Marielle de Sarnez (Modem), qui siège au groupe libéral-démocrate, ne croit guère à ces promesses : « Barroso promettra tout ce qu’on veut, tellement il est malléable ».
Beaucoup font aussi valoir des raisons institutionnelles. En effet, les Irlandais doivent se prononcer le 2 octobre prochain, lors d’un second référendum, sur le traité de Lisbonne. S’ils l’approuvent, comme semblent l’indiquer les sondages, les conditions de nomination du président de la Commission changeront : au lieu d’une majorité simple des voix exprimées, qui est la règle actuelle du traité de Nice, il faudra réunir une majorité absolue des membres du Parlement. En outre, il y aurait quelque incohérence à investir Barroso sous Nice et le reste de sa Commission sous Lisbonne. C’est le principal argument de Daniel Cohn-Bendit, le coprésident du groupe Vert : « c’est comme si on élisait le président de la République avec les règles de la IVe République alors que l’on sait que l’on va passer sous la Ve quelques semaines plus tard. Nous sommes prêts à contester une telle investiture devant la Cour de justice européenne ».
La politique intérieure des États membres pourrait aussi brouiller les cartes : ainsi, les députés allemands du SPD et du FDP (libéraux) préfèreraient attendre le lendemain des élections générales du 27 septembre pour se prononcer. De même, les socialistes portugais qui affrontent des élections législatives en octobre pourraient lâcher Barroso s’ils obtiennent à nouveau la majorité : la raison de leur soutien était la crainte de son retour sur la scène politique locale. Bref, on comprend que le président sortant de la Commission soit pressé d’en finir, le temps qui passe jouant contre lui.

Photos: Thierry Monasse