Un vote positif
n’est nullement garanti lors du second référendum sur le traité de Lisbonne qui
aura
lieu le 2 octobre prochain. À un mois de cette consultation qui tranchera
définitivement le sort du traité de Lisbonne signé en décembre 2007, un sondage
TNS publié jeudi par le Irish Times montre que le « oui » est en
perte de vitesse : il perd 8 points, à 46 % au profit des indécis
(25 %, + 7 points) et du « non » (29 %, + 1 point). Cette
évolution est inquiétante, la campagne en faveur du « non » n’ayant,
contrairement à celle qui a mené au « non » du 13 juin 2008 (à
53,4 %), aucun héraut. Surtout, à trois semaines du scrutin, le
« oui » était encore largement majoritaire, le non n’étant passé en
tête qu’à 15 jours du scrutin…

Pourtant, les
Irlandais ont obtenu des garanties sur les sujets qui les inquiétaient :
la réforme de la Commission est abandonnée (réduction du nombre de
commissaires), l’harmonisation fiscale et sociale est définitivement écartée et
l’Union réaffirme son respect de la neutralité irlandaise ainsi que son absence
de compétence dans le domaine de l’avortement et du mariage gay (tous deux
interdits en Irlande). Mais il semble que les Irlandais soient tentés de se
servir de ce référendum pour manifester leur défiance à l’égard de leur
gouvernement tenu pour responsable de l’ampleur de la crise qui ravage l’île.
Cette prise en
otage de l’Union, pour des motifs de politique intérieure, par un pays qui pèse
moins de 1 % de la population européenne, est désormais ressentie comme
illégitime par les partenaires de Dublin. Les 26 pays qui ont ratifié le traité
de Lisbonne (même si l’Allemagne, la Tchéquie et la Pologne n’ont pas
totalement achevé le processus) peuvent-ils ainsi être stoppés dans leur
volonté de réformer les institutions de l’Union ? D’autant que le problème
risque de se reposer sans cesse : à bientôt trente États membres,
l’incident de ratification ne devient pas seulement possible, mais probable.

Des précédents
historiques existent : Rhodes Island n’a ratifié la première Constitution
américaine que trois ans après les douze autres colonies. La Bavière, elle, n’a
toujours pas ratifié la Loi fondamentale allemande de 1949 qui s’applique
malgré tout à son territoire…
Juridiquement,
l’affaire est certes un rien complexe : il faudrait adopter à 26 ou moins
un traité créant une nouvelle Union européenne dont le fonctionnement pourrait
être ratifié à la majorité (renforcée ou non) des États. Cela fournirait ainsi
l’occasion de poser la question de confiance à l’ensemble des États membres…
Une autre possibilité serait que l’Irlande suspende temporairement sa
participation à l’Union. Histoire de montrer aux Irlandais ce que pèse
réellement son économie et sa monnaie dans le monde d’aujourd’hui.
Mais on peut craindre que
la volonté politique d’engager une telle épreuve de force ne fasse
défaut : lorsque le Danemark avait voté non en juin 1992, l’Allemagne et
la France étaient alors déterminées à lui passer sur le corps, d’où le second
vote positif de juin 93. Aujourd’hui, ni Nicolas Sarkozy, ni Angela Merkel ne sont des dirigeants de cette trempe.