Declan Ganley (photo), l’homme d’affaires qui avait pris la tête de la campagne du non lors du premier
référendum irlandais sur le traité de Lisbonne, au printemps 2008, a annoncé aujourd’hui son retour dans la campagne pour la seconde consultation qui aura lieu le 2 octobre. Pourtant, après la claque géante que son parti transeuropéen, Libertas, a prise lors des élections européennes de juin 2009, il avait annoncé qu’il ne participerait plus à la vie politique de son pays. Un homme d’une rare constance, comme on le voit…

Pour justifier ce retournement, il affirme qu’il a été « provoqué » par les « insanités » proférées par le camp du oui. Il semble surtout que ce soit le sondage rendu public samedi et qui annonce une très large victoire du oui lors du référendum du 2 octobre prochain qui l’a poussé à sortir de sa retraite, la campagne du non souffrant d’un manque de leadership. Le sondage effectué par Red C pour le Sunday Business post montre qu’à trois semaines du scrutin, les intentions en faveur du oui atteignent 62 % alors que le non est à 23 % (53,4 % de non en 2008) et les indécis à 15 %. Début septembre, un autre sondage donnait le oui en perte de vitesse à 46 %, le non à 29 % et les indécis à 25 %. Mais rien n’est joué : lors du référendum du 12 juin 2008, le non n’était passé en tête dans les intentions de vote que le 5 juin, soit sept jours avant le scrutin, il est vrai après une campagne inexistante des partisans du traité.

La profonde crise économique que traverse l’Irlande, qui a vu son « modèle » s’effondrer, et l’impopularité record du gouvernement de Brian Cowen risque aussi de jouer contre le traité, les Irlandais pouvant être tentés de manifester leur mauvaise humeur. Le Premier ministre a prévenu, jeudi, ses compatriotes : « si vous êtes frustrés ou en colère contre la situation économique actuelle (le référendum) n’offre aucune possibilité d’y remédier positivement » : « la question n’est pas de savoir si vous soutenez ou non Brian Cowen. Il s’agit d’exercer votre droit et votre responsabilité dans le meilleur intérêt de l’Irlande ».
Mais la situation économique peut aussi jouer en faveur du « oui », la protection offerte par l’Union
ayant fait ses preuves : l’Islande voisine, qui n’a qu’une hâte, rejoindre l’Union, est là pour en offrir la démonstration. Comme on le dit à Dublin, « entre l’Islande et l’Irlande, il y a une lettre de différence. Et l’euro ». Surtout, le fait que Ganley ait fait la démonstration qu’il ne pesait politiquement rien dans son pays, ni même en Europe, a affaibli le camp du « non » qui n’offre en réalité aucune alternative crédible : rappelons que Libertas n’a obtenu qu’un élu, en France, en la personne de Philippe de Villiers (qui vient de rallier le camp de Nicolas Sarkozy l’homme qui a eu l’idée du traité de Lisbonne :-D).

(affiche de la campagne du non...)
Lech Walesa, le leader historique de Solidarnosc, prix Nobel de la paix et ancien président de la République polonaise, qui avait accepté, contre rétribution, de participer à la campagne de Ganley, a cette fois annoncé qu’il irait « en Irlande pour encourager nos amis irlandais à ratifier le traité. J’estime préférable que l’UE ait ce traité. Elle est comme une voiture qui doit avoir un conducteur, même n’importe lequel », a-t-il déclaré le 9 septembre. « Ce traité de Lisbonne n’est pas très bon, mais l’UE a besoin d’un cadre et de règle. Je demanderai aux Irlandais de l’adopter, quitte à l’amender par la suite ». Ce n’est pas très enthousiaste, mais l’heure est au réalisme, manifestement.