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Libération
Blog «Coulisses de Bruxelles»

Grèce: l'Eurogroupe veut davantage de rigueur

La Grèce n’est pas encore administrée directement par Bruxelles, mais elle n’en est plus très loin. Dans la nuit de lundi à mardi, Jean-Claude Juncker, le président de l’Eurogroupe, l’instance qui réunit les seize ministres des Finances de la zone euro, a annoncé, à l’issue de leur réunion mensuelle, que la Grèce devra adopter de nouvelles mesures d’austérité d’ici à un mois pour ramener son déficit en 2010 de 12,7 % à 8,7 % du PIB s’il s’avère que le premier plan de redressement est insuffisan
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publié le 17 février 2010 à 18h38
(mis à jour le 16 février 2015 à 16h11)
La Grèce n’est pas encore administrée directement par Bruxelles, mais elle n’en est plus très loin. 20100215 Eurogroupe 23 Dans la nuit de lundi à mardi, Jean-Claude Juncker, le président de l’Eurogroupe, l’instance qui réunit les seize ministres des Finances de la zone euro, a annoncé, à l’issue de leur réunion mensuelle, que la Grèce devra adopter de nouvelles mesures d’austérité d’ici à un mois pour ramener son déficit en 2010 de 12,7 % à 8,7 % du PIB s’il s’avère que le premier plan de redressement est insuffisant. Le premier ministre luxembourgeois les a même détaillés : réduction des dépenses publiques, augmentation de la TVA sur les voitures et les produits de luxe et des accises sur l’énergie… Pour l’Eurogroupe, la crise grecque est d’abord « un problème interne » : « la Grèce est responsable de ses finances publiques » a martelé Juncker (photo, plaisantant avec Wolfgang Schaüble et Jean-Claude Trichet).
Certains pays, dont l’Allemagne, et la Banque centrale européenne (BCE), auraient même voulu que l’Eurogroupe exige un effort supplémentaire de réduction du déficit public. Mais d’autres, comme la France, jugeaient que la diminution de 4 % était déjà suffisante et qu’aller au-delà risquerait de déclencher une explosion sociale qui paralyserait les réformes pour longtemps… Juste avant le début de la réunion, Georges Papaconstantinou, le ministre grec des finances, s’était aussi prononcé contre une ration supplémentaire de rigueur : « si nous annonçons aujourd’hui de nouvelles mesures, est-ce que cela empêchera les marchés d’attaquer la Grèce ? » Il n’a pas été complètement entendu : ses partenaires lui ont donné un mois tout juste pour mettre en place son plan de rigueur pour 2010, sous la surveillance d’experts de la Commission, de la BCE et du FMI (Fonds monétaire international).
20100215 Giorgos PAPAKONSTANTINOU 10 C’est seulement s’il s’avère insuffisant, ce que semblent penser beaucoup de pays, qu’il devra adopter un autre train de mesures douloureuses. Et ce n’est pas fini : pour les années à venir, la Grèce devra « appliquer le plus vite possible un ensemble de réformes structurelles avec des actions dans divers domaines : sur les salaires, sur les retraites, sur la santé, sur l’administration publique », a détaillé la ministre espagnole des finances, Elena Salgado.
Car, comme au poker, l’Eurogroupe veut qu’Athènes paye pour voir : il n’est pas question de la soutenir gratuitement face aux marchés qui l’attaquent en faisant grimper les taux d’intérêt de ses emprunts sans qu’elle fasse un sérieux effort de remise en ordre. La confiance à l’égard de ce pays qui a trop souvent triché dans le passé est tellement écornée que, cette fois-ci, ses partenaires de la zone euro ne relâcheront pas leur pression.
Néanmoins, « les Grecs ne doivent pas penser qu’ils seraient livrés comme ça à la voracité des marchés financiers », a prévenu Juncker. Certes, l’Eurogroupe, comme le Conseil européen de jeudi dernier, s’est contenté de l’assurer de son soutien politique, mais il se réserve d’intervenir si nécessaire : « nous n’avons pas voulu nous exprimer aujourd’hui publiquement sur les mesures que nous mettrons en branle », car il n’est pas « sage (d’en) discuter publiquement ». Mais « les marchés financiers se trompent lourdement s’ils pensent qu’ils peuvent mettre en pièces la Grèce ». C’est toute la délicatesse de l’exercice : la pression des marchés est utile, car elle contraint le pays à la réforme. Mais, passé un certain seuil, elle rendra la rendra difficile : « actuellement, les taux exigés par les marchés coûtent 0,5 % de PIB à la Grèce sur une année pleine », estime Laurence Boone, chief economist chez Barclays capital.

Photos: Thierry Monasse (non reproductible sauf autorisation)

NB: il s’agit d’une version longue de mon papier paru ce matin dans Libération.