
Le chef de l’Etat français, Nicolas Sarkozy, est persuadé que seul un « surcroit d’intégration européenne, notamment sur les plans budgétaire, fiscal et social », comme on l’explique à l’Elysée, permettra de rassurer les marchés. En clair, insiste-t-on dans l’entourage du Président, il faut reprendre très rapidement la marche vers le « fédéralisme » qui a été interrompu en 1999, lors du lancement de la monnaie unique, chacun pensant qu’il pouvait gérer sa politique économique sans se préoccuper des effets sur l’euro.
L’Allemagne et la France veulent donc présenter à leurs partenaires, le plus rapidement possible, un ensemble de mesures afin que la politique monétaire ait enfin son pendant économique, c’est-à-dire une gouvernance commune. « A ce stade, il n’y a pas encore de mesures concrètes que l’on peut lister», reconnait-on à Paris. Mais, et on s’en réjouit, « l’atmosphère a changé en Allemagne : le gouvernement n’a enfin plus d’exclusive et accepte de discuter de tous les sujets sans embarras ». Il faudra sans doute patienter jusqu’au conseil européen des chefs d’Etat et de gouvernement du 4 février et plus probablement des 24 et 25 mars prochain pour qu’un paquet de mesures systémiques soit présenté.
La réponse aux angoisses des marchés se fera à plusieurs niveaux. Ainsi, les
Européens, qui ont bricolé à la hâte, en mai dernier, le FESF, se sont aperçu il y a quelques semaines qu’en réalité, il ne pouvait emprunter qu’entre 200 et 300 milliards d’euros au tarif « triple A » sur les 440 théoriques : en effet, chaque pays est garant seulement d’une partie des emprunts effectués par le Fonds et tout le monde n’est pas noté triple A… En outre, une partie des sommes empruntées doit être affectée aux réserves. Bref, il va falloir revoir l’architecture afin de lui permettre d’emprunter les 440 milliards prévus, ce qui pourra passer par une augmentation de cette somme, certains pays suggérant un doublement, d’autres, la suppression de tout plafond. Mais Paris, tout comme Berlin et la Commission, ne sont pas favorables à cette solution de peur d’envoyer le signal aux marchés qu’ils se préparent à venir au secours de l’Espagne…

Paris, soutenu par plusieurs Etats membres et la Commission, est aussi favorable à l’élargissement des moyens d’actions du FEFS, par exemple en l’autorisant à intervenir sur le marché secondaire pour racheter des obligations d’Etat en lieu et place de la Banque centrale européenne qui en a déjà acquis près de 80 milliards depuis le mois de mai. Un autre débat a aussi commencé sur le niveau des taux d’intérêts demandés aux pays aidés que certains jugent trop élevés. Les solutions qui seront finalement retenues s’appliqueront bien sûr au futur mécanisme européen qui prendra la suite du FESF en 2013.

Faut-il aller plus loin et créer des « eurobonds », c’est-à-dire des emprunts européens, comme l’ont proposé l’Italie et le Luxembourg ? Dans un entretien au Monde daté de samedi, le ministre chargé des affaires européennes, Laurent Wauquiez, suggère plutôt de lancer des « project bonds » qui financeraient des grands projets d’infrastructures, comme le proposait déjà Jacques Delors, l’ancien président de la Commission, en…1993. Bref, sous la pression des marchés la zone euro essaye de rattraper une décennie d’intégration perdue.