Du côté du Grand Paris, l'année scolaire s'est terminée avec la publication du décret qui a officialisé l'accord Etat-région sur le Grand Paris Express, en clair le super-métro. Voilà pour de bon le projet lancé. Il n'y a plus qu'à faire, si l'on ose dire.
Dans la loi Grand Paris, figurait toutefois un autre gros morceau, le contrat de développement territorial. Une nouveauté dont on vous livre l'explication officielle : «Les contrats définissent, dans le respect des principes énoncés aux articles L. 110 et L. 121-1 du code de l'urbanisme, les objectifs et les priorités en matière d'urbanisme, de logement, de transports, de déplacements et de lutte contre l'étalement urbain, d'équipement commercial, de développement économique, sportif et culturel, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers et des paysages et des ressources naturelles». Vaste programme, comme disait le Général.
Il s’agit, ni plus ni moins, de fabriquer la ville dans tous ses aspects. Avec un objectif central: dépasser enfin le chiffre très insuffisant de 40000 logements neufs par an en Ile-de-France pour atteindre 70 000, et en produire 10000 dans les périmètres des dix-sept contrats prévus.
Or, dans ces contrats, le préfet de région est à la manoeuvre. Le Moniteur a publié cet été une intéressante note juridique de Renaud Gourves, avocat à Paris, qui rappelle que le contrat est «prescriptif». En clair, les documents d'urbanisme de la commune ou de la communauté d'agglomération, doivent être compatibles avec le contrat. Fine mouche, le juriste note que «d'âpres négociations dans les prochains mois sont à prévoir entre les édiles concernés et le préfet». Ce dernier, écrit Gourves, «influera sur tous les documents locaux, ce qui le place au centre de l'aménagement du Grand Paris».
Dans bien des communes, les maires ne veulent pas bâtir. Avec le contrat de développement territorial, voilà ces récalcitrants sous contrainte. Dans une interview publiée le 24 août par la Gazette des communes, Daniel Canepa commençait par souligner que «dans certaines zones, les objectifs ne sont pas si loin de ce que nous demandons». Mais il ajoutait aussi: «Sur d'autres territoires cela sera plus difficile». Le préfet est un homme ferme, qui, avec le Grand Paris, a une promesse sarkozienne à tenir. A bon entendeur...
Mais peut-on obliger les élus allergiques à la construction à se soigner? Tous les ans, la fondation Abbé Pierre dresse une liste des villes mauvaises élèves de la loi SRU, celle qui prévoit 20% de logements sociaux dans le parc. Il y a des résistances vieilles de vingt ans. La loi permet au préfet de se substituer au maire pour lancer un chantier, mais aucun n'a jamais accompli ce coup de force. «C'est infaisable», disent les spécialistes.
Pourquoi, alors, le préfet Canepa réussirait-il? Pour Gilles Ricour de Bourgies, président de la Fnaim Ile-de-France, la méthode des contrats est très différente. «Il est clair que la majorité des maires ne sont pas bâtisseurs, estime-t-il. Mais je crois que l'on a trouvé, avec le contrat, le bon véhicule. Ce n'est pas une loi nationale pour tout le pays. On va cibler un territoire et mettre en relation avec lui un projet concret».
Et de décrire: «Les choses vont être très simples: on aura un tracé défini, des emplois à la clé, des logements neufs ou réhabilités, une image de la commune qui va changer. L'identification de la l'habitant à sa commune va jouer. C'est une mécanique très lisible pour l'électeur. Le préfet ne sera pas tout seul. Derrière, ça va être beaucoup plus difficile pour certains de justifier les blocages. Il y aura moins de marge pour le calcul politique».
Dans ce scénario idéal qu'il décrit, le président de la Fnaim voudrait bien voir son organisme associé à la définition des contrats parce que, «avec 1800 agences en Ile-de-France, les agents immobiliers connaissent leur quartier». Pour lui, ces professionnels peuvent même évaluer les effets des aménagements sur les autres quartiers. «Ils savent ce que leur disent leurs clients», conclut-il. Une sociologie de terrain qui en vaut une autre.