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Blog «Grand Paris et petits détours»

Devedjian et Huchon contre un département du Grand Paris

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La proposition de fusion des quatre départements centraux de l’Ile-de-France que Claude Bartolone, président (PS) de la Seine-Saint-Denis a faite la semaine dernière trouve - c’est un euphémisme - peu de soutien. A quelques rares exceptions près, aucun élu n’en veut. En rendant publique sa contribution au débat sur la gouvernance qu’a lancé Paris Métropole, Claude Bartolone a semé le trouble. Car se mélangent dans cette sortie des questions d’organisation territoriale ( trouver l’échelle qui cor
publié le 17 février 2012 à 19h35
(mis à jour le 16 février 2015 à 16h03)

La proposition de fusion des quatre départements centraux de l'Ile-de-France que Claude Bartolone, président (PS) de la Seine-Saint-Denis a faite la semaine dernière trouve - c'est un euphémisme - peu de soutien. A quelques rares exceptions près, aucun élu n'en veut. En rendant publique sa contribution au débat sur la gouvernance qu'a lancé Paris Métropole, Claude Bartolone a semé le trouble. Car se mélangent dans cette sortie des questions d'organisation territoriale ( trouver l'échelle qui correspond aux bassins de vie) et de solidarité (rééquilibrer entre territoires riches et pauvres), ce qui est déjà complexe. Là dessus s'ajoute la situation particulière de la Seine-Saint-Denis, plombée par les emprunts toxiques et croulant sous les charges d'une population précaire.

Cette confusion se retrouve dans les réactions, qu'elles soient positives ou le plus souvent, très négatives. Bertrand Kern, maire socialiste de Pantin et président de la récente communauté d'agglomération Est ensemble, est plutôt du côté des soutiens  et voit dans la fusion le moyen «d'en finir avec cette coupure entre la capitale et la banlieue, entre les territoires qui restent riches et ceux qui restent pauvres».

Autre soutien,  celui d'un groupe de parlementaires et de conseillers généraux UMP de la Seine-Saint-Denis, réunis derrière le sénateur-maire de Pavillons-sous-Bois Philippe Dallier. Celui-là est plus encombrant. Dans un communiqué, ils saluent «cette prise de conscience» mais enrôlent Kern dans leur raisonnement. Ce dernier, écrivent-ils, «a même déclaré qu'il accepterait la disparition de sa communauté d'agglomération à peine créée, au profit d'une communauté urbaine». Ils soulignent aussi que Bartolone a reçu l'appui des conseillers généraux PS. Pour autant, le groupe  ne félicite pas du tout le président du conseil général: il le morigène pour «l'impasse budgétaire» dans laquelle se trouve la collectivité. «Il est temps de tourner la page d'une longue période de gestion hasardeuse et de repli sur soi qui n'ont fait qu'aggraver une ségrégation territoriale bien réelle». Les emprunts toxiques, l'augmentation des dépenses sociales doivent «amener la majorité de gauche à faire son autocritique».

Encore ceux-là sont-ils au moins d'accord avec la proposition de fusion de Claude Bartolone. Patrick Devedjian, président (UMP) du conseil général des Hauts-de-Seine, lui, ne veut absolument pas entendre parler d'une fusion et fait à  Bartolone les mêmes reproches de mauvaise gestion. «La Seine-Saint-Denis, nous a-t-il dit, a des ressources supérieures à celles des Hauts-de-Seine». Ajoutant aussitôt: «Je sais que son président dira qu'il a des dépenses supérieures mais c'est aussi parce qu'il gère autrement. Cette proposition est une fuite en avant devant le résultat d'une mauvaise gestion». Certes, la composition sociale du partement est défavorisée «mais c'est le résultat d'une politique délibérée qui a ignoré la mixité sociale et qui a été conduite systématiquement par la gauche».

Sur la création d'un département unique, Devedjian est net : «C'est une mauvaise idée, qui doublonnera avec la région à cause des compétences». Rappelant que la gauche avait défendu la clause de compétence générale lors de la réforme territoriale, il développe à ce sujet un raisonnement politique assez subtil: «Il est paradoxal de réclamer cela et de s'opposer à la spécialisation des compétences. Cette création conduirait immanquablement à la fusion de ce département et de la région. On arriverait par d'autres moyens à la politique qu'a préconisé Nicolas Sarkozy avec le conseiller territorial unique».

Est-ce parce qu'il perçoit ce risque? En tout cas, Jean-Paul Huchon, président (PS) du conseil régional, ne veut pas non plus du département du Grand Paris. Certes, lui n'accable pas la gestion de Claude Bartolone.«Dans ce qu'il propose, nous a-t-il dit, il y a une composante avec laquelle on ne peut qu'être d'accord: le besoin d'une vraie solidarité financière. Mais là, il a choisi une solution de catastrophe, de sauvetage». Pour ces affaires de rééquilibrage, Jean-Paul Huchon propose «un smic communal, qui représenterait au moins 60% de la moyenne de ressources régionale».

Sur le département géant, en revanche, c'est non. «Cela contribuerait à créer un monstre qui va casser les solidarités et exclure les départements de la grande couronne. De plus, Claude Bartolone fait un pari risqué en tablant que Paris et les Hauts-de-Seine pourraient être mis à contribution».

Reste que tout cela  sortira probablement des limites de la région capitale. «J'attends les positions de François Hollande sur l'acte III de la décentralisation, dit Huchon. S'il y a une nouvelle étape régionaliste, ce n'est pas le moment de créer des mastodontes concurrents».

PS: Lire aussi l'interview de Claude Bartolone dans Libération du 18 et 19 février.