
C’est dans la nuit de lundi à mardi que les ministres des Finances de la zone euro sont parvenus, après quatorze heures de négociation, à se mettre d’accord sur un second plan d’aide à la Grèce (130 milliards d’euros en plus de la restructuration de la dette), après celui de mai 2010 d’un montant de 110 milliards d’euros. Une solidarité sans précédent, là aussi, impensable il y a encore deux ans.
• Quelle perte pour les établissements financiers ?
Les créanciers privés ont dû accepter, dans la nuit de lundi, de renoncer à 53,5 % de la valeur faciale des obligations grecques qu’ils détiennent au lieu des 50 % qu’ils avaient négociés. En réalité, avec l’allongement des délais de remboursement et la baisse des taux d’intérêt qu’ils ont dû consentir, la perte réelle qu’ils encaisseront sera d’environ 72 % ! Les nouvelles obligations (soumis à la loi britannique et non plus grecque) qu’ils recevront en échange auront une durée de 30 ans et porteront intérêt de 2 % par an jusqu’en 2015, puis de 3 % jusqu’en 2020, puis de 4,3 % ensuite. Cet effort supplémentaire était nécessaire pour ramener la dette grecque à 120,5 % en 2020 : avec un « haircut » limité à 50 %, l’endettement aurait encore été de 129 %... La dette grecque se montant à 259 milliards, si on soustrait les 50 à 55 milliards détenus par la Banque centrale européenne (BCE), il reste entre 204 et 209 milliards entre les mains des banques, assurances, hedge funds, etc. (1). Après restructuration, la dette privée de la Grèce ne sera plus que de 100 milliards, soit un abandon de créance compris entre 104 et 109 milliards. La BCE, elle, va échanger ses titres à leur valeur d’achat (entre 70 et 80 % de leur valeur faciale), soit une diminution supplémentaire de 5 à 7 milliards. En tout, la Grèce sera donc encore endettée à hauteur d’environ 150 milliards…

• À quoi va servir le nouveau prêt accordé à la Grèce ?
Après les 110 milliards prêtés à la Grèce en 2010 (qui n’ont pas encore été entièrement décaissés), la zone euro et le FMI vont ajouter 130 milliards supplémentaires afin de couvrir les besoins de financement grecs jusqu’en 2014. Sur cette somme, 40 milliards serviront à la recapitalisation des banques grecques (qui seront donc nationalisées avant d’être revendues plus tard), le reste servant à financer le remboursement de la dette et les besoins budgétaires (paiement des fonctionnaires, des pensions, etc.). Il s’agit d’un prêt et non d’un don : la Grèce devra payer des intérêts (autour de 3 %) sur ces sommes et les rembourser à terme. Mais ces 240 milliards ne s’ajoutent pas en totalité au reste de la dette : par exemple, la somme affectée à la recapitalisation des banques permettra à la Grèce de gagner de l’argent.
• La zone euro retrouvera-t-elle son argent ?

• La Grèce sous tutelle ?
Les Européens ont perdu toute confiance à l’égard du personnel politique grec, dont l’incompétence le dispute à la corruption. L’Eurogroupe a donc décidé que la Commission, la BCE et le FMI enverront une mission permanente sur place afin de surveiller l’application des réformes. La Grèce avait dû accepter un tel contrôle après la faillite de 1893 : entre 1897 et 1914, la commission financière internationale (Allemagne, Autriche-Hongrie, France, Grande-Bretagne, Italie) avait été chargée de surveiller le budget grec, ligne par ligne, ce qui avait permis de moderniser le pays.
(1) Banques européennes : 40 milliards ; banques grecques : 50 milliards ; autres entités grecques : 30 milliards (dont 20 milliards pour les fonds de pension) ; compagnies d’assurances européennes : 20 milliards ; autres : 66 milliards.
Documents à télécharger (tous en anglais):
Communiqué du ministère grec des finances et déclaration du «steering committee of the private creditor-investor committee for Greece» (PCIC) sur les termes de l’échange volontaire de la dette grecque.
[ Déclaration de l’Eurogroupe ]
Memorandum (programme que la Grèce devra appliquer)