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Libération

Pédé comme un phoque

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par Robert McLiam Wilson
publié le 14 février 2014 à 18h46

En vieillissant, les gens deviennent plus conservateurs, craintifs, conscients de leur mortalité, réactionnaires. Nous l’avons toujours su. Ce n’est pas nouveau. Les Grecs anciens s’en sont plaints. Il semble que l’âge médian pour cette petite embardée à droite soit en train de baisser. Ce qui, avant, advenait à 60 ans a commencé à se produire à 50, et déjà 40 n’est plus l’âge de l’optimisme et de la tolérance qu’il était. Aucune importance. C’est ainsi. En vieillissant, on vire à droite. La nature est ainsi faite. L’arbre bourgeonne, la colline se couvre de neige, il y a des putains d’araignées partout. Bref, c’est naturel.

Nous le craignons, nous le sentons venir, nous scrutons son arrivée, horrifiés à l’idée que bientôt nous geindrons que la musique actuelle ne sait que gueuler, que les célébrités sont débraillées et que les immigrés sont… bon, vous voyez. Mais il existe un autre phénomène, lié à celui-ci, qui nous est moins familier. Il s’agit de ce moment terrible quand, soudain, à propos d’un sujet de société, et ce malgré tous nos efforts pour convoquer notre ouverture d’esprit et bonne foi, nous voyons avec une lucidité aveuglante que la droite, en dépit de tout, a raison.

Chers lecteurs, cela vient de m’arriver. L’événement, très intime, fut d’une grande intensité. Cela s’est produit quand j’ai compris que les manifestants du printemps français et les antimariage gay étaient dans le vrai. Certes, tous ces gens semblent plutôt atroces, stupides, intolérants, voire biza