Par où passent les flux d'information ? Qui contrôle les réseaux de savoir ? A l'heure où Gafa (Google, Apple, Facebook, Amazon), l'hydre à quatre têtes, contrôle le monde, ces questions sont au cœur de la nouvelle «diplomatie digitale» et font l'objet de fréquents scandales : où l'on découvre que les Etats utilisent tous les moyens technologiques à leur disposition pour faire ce qu'ils ont toujours fait, s'espionner, se surveiller. C'est là un usage regrettable des moyens scientifiques et techniques mis à notre disposition, dira-t-on. Dans un monde idéal, la science pure pourrait poursuivre son cours sans être utilisée à des fins répréhensibles. Or, l'histoire des sciences conteste singulièrement cette conception d'une séparation de la science et du pouvoir, en l'historicisant. Travail scientifique, ingéniosité technologique, enjeux politiques et financiers sont indissolublement imbriqués : c'est le sujet du dernier livre du grand historien britannique Simon Schaffer, la Fabrique des sciences modernes, qui paraît ces jours-ci en français.
Newton à la plage, tel un enfant solitaire jouant avec des galets et des coquillages. C'est sur cette image saisissante, autoportrait de Newton repris par sa légende, que s'ouvre le livre. Loin de cette image d'Epinal de Newton en génie solitaire, Simon Schaffer le met en scène au milieu d'un dense réseau d'informateurs, d'observateurs et d'intermédiaires. Le récit qu'il donne de l'utilisation de ce savoir par Newton pour construir