Abraham Poincheval s’est enfermé dans un ours, pendant treize jours. Ça se passait la semaine dernière au musée de la Chasse et de la Nature, le plus beau musée de Paris. Un musée où la fantaisie de l’art contemporain souffle de la vie aux animaux empaillés. Un musée qui semble toujours en lutte contre son propre nom : la chasse, peut-être, mais surtout la présence des animaux sur la Terre.
Abraham Poincheval (c’est son vrai nom) a l’habitude, depuis plusieurs années, de s’enfermer dans des espaces très étroits. Au début, je voyais ça comme de l’art inutile, au beau sens du terme, dans le courant de l’«idiotie» : quand on s’appelle Poincheval, on est forcément un peu dada. Mais en discutant avec l’artiste, j’ai pris conscience qu’il pointait plutôt le museau du côté du chamanisme, disons de Beuys enfermé avec son coyotte.
L’ours est composé de la peau de deux ours, pour que l’artiste, déjà pas très épais (une cinquantaine de kilos) puisse s’allonger dans la structure, pieds vers la queue et tête dans la tête. L’intérieur de l’ours est garni d’un fin matelas et d’un dispositif, simple et épuré, d’aération, de stockage d’aliments, d’approvisionnement en eau et d’évacuation des déchets. Les tuyaux passent par les pattes de l’ours. Le gardien de cette salle du musée est hilare. L’expérience lui plaît beaucoup et il emmène volontiers les visiteurs voir l’écran dans la salle à côté, où une webcam filme Poincheval vingt-quatre heures sur vingt-quatre (il peut la débrancher pour avoir