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Tribune

M. Le Pen, votre seigneur Ebola peut aller se recoucher, il ne m’aura pas

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Mardi, le président d’honneur du FN parlait de l'«explosion démographique» dans le monde et avait lancé que «Monseigneur Ebola peut régler ça en trois mois». Une écrivaine franco-rwandaise lui répond.
. (Illustration Stefano Rossetto)
par Annick Kayitesi-Jozan, Ecrivaine
publié le 23 mai 2014 à 17h38

Le 25 mai sera-t-il une belle journée ? J'en étais convaincue jusqu'à il y a quelques heures. J'attends toujours le 25 mai avec impatience. C'est mon anniversaire. Cette année, je vais avoir 35 ans. Un miracle. Parce que je suis une survivante, je suis rescapée du génocide des Tutsis du Rwanda. Mais pas seulement. Je suis aussi une mère, et ce 25 mai, c'est aussi la fête des mères et j'ai hâte de découvrir les dessins que mes enfants me préparent en secret depuis quelques jours. Ça aussi, c'est un miracle, un bonheur inespéré. Mais depuis quelques heures, mon cœur n'est plus vraiment à la fête. Une phrase tourne dans ma tête encore et encore… «Monseigneur Ebola peut régler ça en trois mois…»

Ces mots que je lis et relis dans le journal ont été prononcés par le candidat du Front national M. Jean-Marie Le Pen, en campagne à Marseille pour les élections européennes du 25 mai… à propos de l’immigration. Eh bien, Monsieur Le Pen, je vais vous dire une chose : le pire Ebola qui ait jamais frappé l’homme, c’est bien celui qui sort de votre bouche. C’est la haine. Au Rwanda, le pays où je suis née, il a fait un million de morts en trois mois. Comme quoi, vous voyez que votre Dieu ne vous trompe pas, il peut être efficace.

Eh oui, Monsieur Le Pen, vous avez raison, votre seigneur Ebola est très dangereux, il peut faire beaucoup de mal si on le laisse prendre le pouvoir. Je me souviens qu’un jour, quand j’étais enfant, j’ai accompagné ma mère voter. Je ne sais plus de quelles é