Par Louis Marrou
La Rochelle à la télévision, La Rochelle sur Tweeter, La Rochelle à la radio. La préfecture de la Charente-Maritime a été durant toute la fin de semaine dernière sous les feux de l’actualité. La démission du gouvernement Valls, le devenir des «frondeurs» ont fait de la tenue de l’université d’été du Parti Socialiste, le feuilleton médiatique de ces trois derniers jours. Pour l’habitant de l’agglomération, cette exposition maximale est source d’étonnement, parfois d’agacement dans une ville touristique, pourtant habituée à se montrer et à être vue. Elle dessine une géographie de l’espace bien particulière. Petit tour de ville.
Les «hotspots» du week-end A s'en tenir aux journaux et sites d'information, il y avait pour le moins deux gros événements à La Rochelle la semaine dernière: - la tenue de l'université d'été du Parti Socialiste. C'est un rendez-vous bien ancré depuis quatre lustres. Cette année, la question était de savoir quel sort serait réservé au nouveau maire, Jean-François Fountaine, exclu du PS, pour s'être présenté au printemps dernier contre la candidate soutenue par la rue de Solférino, sortie en tête des primaires. Serait-il à la tribune principale, pour le mot d'accueil, comme l'avaient fait avant lui ses prédécesseurs Maxime Bono ou Michel Crépeau? Ou pas ? Ça, c'était avant la démission du gouvernement Valls…
- le troisième match du Stade Rochelais Atlantique dans le Top 14, le championnat de France de l’élite du rugby, et le premier à domicile. Après deux défaites, les Rochelais avec 0 point affrontaient, samedi dans l’après-midi, «l’ogre» toulousain vainqueur de ses deux premiers matchs et en tête du classement. Pour le «petit Poucet» du championnat, qui vient de remonter au firmament de ce sport, le défi était de taille.
Plan général La Rochelle
Pour les Rochelais, il y avait encore trois autres points d’attraction : - l’ouverture de la Foire de La Rochelle au Parc des Expositions ; - la rentrée des classes qui s’annonce et les derniers achats dans les zones commerciales de la périphérie ; - les plages et la mer, car avec le retour de quelques chaleurs, l’attrait du littoral reste fort pour l’habitant ou les touristes, encore nombreux en cette fin de mois d’août.
Enfin, les experts-comptables au pied marin ont pu participer sur le plan d’eau à leur 24e Challenge National.
Bien sûr un stade (les Rochelais ont dominé les Toulousains 37-25 devant 15.000 supporters déchaînés), un parc d’Exposition, des zones commerciales, c’est bien moins glamour que les mille et un recoins d’une université d’été (Jean-François Fountaine a eu le droit de dire son mot de bienvenue) au programme pléthorique, à en croire le site Internet du PS et la liste imposante des Ateliers. Plongeons sans plus attendre dans ces lieux qui font le quotidien de nos écrans et autres supports d’information.
Gare à toi Ah, la gare de La Rochelle : sa verrière, son piano, ses toilettes sèches (condamnées) et ses TGV qui, à intervalles réguliers déversent leurs flots de congressistes, de ministres et autres célébrités. Paris=>La Rochelle, 3 heures et quelques minutes de train, mais la promesse de la mer, du soleil. Comme un petit air de vacances. La tenue des premières universités du PS coïncide d'ailleurs avec l'arrivée du Train à grande vitesse, en 1993, sous la houlette de Michel Crépeau, le maire Radical de gauche de l'époque.
Vendredi, samedi, chaque fournée de rames TGV offre l’assurance de son lot de nouveaux arrivants un tant soit peu connu. Surtout, ils déversent durant trois jours des monceaux de jeunes gens bien habillés, chemises blanches, pantalons élégants, vestes déboutonnées ou sur l’épaule, qui tranchent avec le short/polo de rigueur dans la cité balnéaire. La panoplie du futur technocrate fait fureur. Le Rochelais de base a l’impression de feuilleter en pleine rue un catalogue de prêt à porter et s’informe ainsi des dernières tendances capillaires.
AfficheExpression libre à La Rochelle. Photo : Louis Marrou (1er septembre 2014)
Les arrivées d’Arnaud Montebourg ou de Manuel Valls ont été de grands moments. Les comités d’accueil sont plus ou moins fleuris, bruyants, musclés. Les hommes aux oreillettes sont partout ; les petites et grandes mains de cabinets s’affairent sur leurs portables. L’importance du voyageur se mesure au nombre de caméras, d’appareils photo et de membres des forces de l’ordre. Et quand le train entre en gare, c’est la cohue, la ruée pour être à l’aplomb de la bonne porte. Une Secrétaire d’Etat, chemisier blanc impeccable, lunettes de soleil sur le nez sort discrètement. Un adjoint au maire l’accompagne. Elle est attendue pour un débat à deux pas de là.
Politiques à l'Encan Les universités d'été du PS se tiennent à l'Espace Encan, le haut lieu des séminaires, congrès et salons rochelais. Toute l'année se succèdent des centaines de manifestations qui font de La Rochelle une des villes les plus prisées pour ce genre d'événements. Le bâtiment fait partie du patrimoine rochelais : c'est l'ancienne halle à marée, la criée où l'on vendait le poisson à l'encan, aux enchères. Le bassin des Chalutiers peine à se faire appeler le bassin des Grands Yachts. La façade de l'Encan est barrée d'un grand «Réinventons-nous !» à l'adresse des congressistes.
Le complexe offre un vaste auditorium et des dizaines de salles pour toutes taillesc. C'est le cœur du dispositif. C'est là que se tiennent les «plénières», un grand nombre de débats et l'essentiel du programme officiel (ateliers, conférences, regards croisés). Le parc de stationnement est pris d'assaut par les camions régies des télévisions et c'est là que se tiennent la plupart des «directs». Sur le Parvis de l'Encan est dressé un village de tentes pour l'accueil des congressistes. Le badge de couleur y règne en maître. «J'ai cru que j'allais rentrer dans une boîte à sardines» dit A. Montebourg en sortant de la cohue suite à son discours en plénière !
«Il y a un Rubicon à ne pas franchir» (Luc Carvounas, 8h50, le 31/8, France Info) La Rochelle, «belle et rebelle» comme disait le slogan à l'époque de Michel Crépeau, ville littorale sans fleuve a trouvé son Rubicon. La «cité corsaire», dixit le site Internet du journal Le Parisien, a ses rebelles. Samedi 30 août, les députés frondeurs et leurs partisans ont décidé de se réunir. Devant l'affluence prévisible, la réunion est déménagée dans le Grand Amphi de la Faculté des Lettres, Arts et Sciences Humaines (FLASH) de l'Université de La Rochelle, là où mardi 2 septembre les étudiants de première année vont faire leur rentrée universitaire. C'est l'Amphi 400, à deux pas de l'Amphi Choderlos de Laclos, l'auteur des «Liaisons dangereuses». C'est là, qu'au milieu des débats, apparaît la Garde des Sceaux Christiane Taubira. La salle exulte, les flashs crépitent et la réunion peine à reprendre son cours normal.