Les europhobes ont perdu une belle occasion de se taire, pour paraphraser Jacques Chirac : en déposant une motion de censure contre la Commission présidée par Jean-Claude Juncker, ils ont non seulement montré qu’ils ne pesaient rien au Parlement européen, mais ils ont surtout démontré leur abyssale inconsistance idéologique.

La motion présentée par le groupe EFDD (acronyme anglais de « Europe de la liberté et de la démocratie directe ») du leader de l’UKIP, Nigel Farage, soutenu par le Front National, n’a obtenu, jeudi, que 101 voix, contre 461 et 88 abstentions (les Verts et la gauche radicale). Rappelons que le 22 octobre dernier, il s’était quand même trouvé 209 députés pour refuser l’investiture de la Commission Juncker, dont de nombreux députés de gauche. Cette fois-ci, les europhobes n’ont pu compter que sur leurs propres forces : 101 députés, c’est peu, très peu dans un Parlement de 751 membres. Et cela ramène à sa juste proportion la soi-disant « vague » europhobe qui aurait submergé le vieux continent (en réalité, la France, et la Grande-Bretagne).

Même si tout cela n’est pas très moral, c’est très « my country first » et donc très exactement conforme à ce que souhaitent nos europhobes. Ce n’est donc pas une motion de censure qu’aurait du déposer Farage, Grillo, Le Pen and co, mais une motion de soutien à celui qui s’est comporté en défenseur sourcilleux des intérêts de son pays ! Ceux qui auraient quelques raisons de se plaindre, ce sont les pro-européens, pas les anti-européens.
Si l’Union est largement insuffisante sur les questions fiscales, c’est parce que les États l’ont voulu ainsi en exigeant le vote à l’unanimité. Néanmoins, même imparfaite, elle a permis d’harmoniser la taxation des revenus des capitaux (pour les particuliers), de mettre fin au secret bancaire et d’éliminer un certain nombre de pratiques fiscales déloyales. On a oublié qu’avant les années 90, la France, pas plus que ses voisins, ne taxait pas les revenus des capitaux des non-résidents… Si la fiscalité n’avait pas été une compétence communautaire, même verrouillée, rien n’aurait bougé.

La réalité est que seule davantage d’intégration permettra de mettre fin à la concurrence fiscale. Voir des europhobes reprocher à un ancien chef de gouvernement de ne pas avoir été assez européen, voilà un vrai plaisir d’esthète. Comme le disait si bien Michel Audiard, « les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît ».