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Libération
TRIBUNE

Répondre au fléau du chômage des jeunes

En France, près de 25% des jeunes sont au chômage. Le collectif #autrement propose des solutions pour relever le défi de l’emploi des jeunes.
Isabelle Stankiewiez (C), chargée de relation avec les entreprises à la Mission locale de Dreux, encadre des jeunes demandeurs d'emploi issus de quartiers difficiles, le 18 Janvier 2008. (Photo : ALAIN JOCARD.AFP)
publié le 20 février 2015 à 15h52

Pourquoi le chômage des jeunes est-il un problème en soi ? D’abord parce que les jeunes ont plus souffert de la crise que les autres catégories de la population. Public vulnérable sur le marché de l’emploi, ils sont parmi les premiers à en sortir lorsque la conjoncture se dégrade. La France compte un taux de chômage élevé chez les jeunes, près de 25 %, pour seulement 8 % en Allemagne ou 12.5 % au Danemark. Et encore, ce taux cache des milliers d’étudiants inscrits dans des filières avec de faibles perspectives d’embauche !

Il ne suffit pas d' «attendre» que le chômage de l’ensemble de la population baisse pour régler celui des jeunes. Leur taux de chômage est resté élevé, y compris en période de reprise économique au milieu des années 2000. Le problème est donc structurel.

La répartition géographique du chômage des jeunes est aussi inégale. Cette «génération sacrifiée» se concentre dans des poches de pauvreté. Certaines villes ou quartiers concentrent ainsi toutes les difficultés : échec scolaire, chômage des jeunes, taux élevé de pauvreté, délinquance, dépenses sociales importantes.

La France a donc tout intérêt à investir aujourd’hui dans le formidable atout démographique qu’est sa jeunesse. Car une jeunesse au chômage, c’est une jeunesse qui accumule un retard qu’elle ne comblera jamais. C’est une jeunesse qui ne s’insère pas dans la vie active, ni dans la vie citoyenne. C’est aussi parfois une jeunesse qui tombe dans un cycle de délinquance.

Des politiques contradictoires

Face à ces défis, les politiques ont jusqu’ici répondu par des contrats aidés. Or si les contrats aidés ont permis de stabiliser le chômage des jeunes et d’ancrer la culture du travail chez ceux qui en étaient très éloignés, ils ne suffisent pas à créer de l’emploi durable. Dans ce maquis de dispositifs, les jeunes se perdent, de même que leurs conseillers parfois. Leur accompagnement mobilise une myriade d’acteurs, des missions locales aux animateurs sociaux, qui ne se parlent pas toujours.

S’agissant de leur qualification professionnelle, des politiques contradictoires ont été menées. Tant sur l’apprentissage que sur l’enseignement technique, trop de va-et-vient ont amoindri leur crédibilité et leur efficacité. Nous sommes donc loin de la situation autrichienne où un tiers des jeunes est en apprentissage et où leur taux de chômage n’est que de 9 %. En France, malgré un discours politique volontariste sur le «raccrochage» des décrocheurs, les résultats se font toujours attendre.

Un nouveau contrat entre les jeunes et la société

Pour relever le défi de l’emploi des jeunes, des solutions existent et certaines sont déjà l’œuvre. La «garantie jeunes», dont l’expérimentation a débuté en 2013, engage une révolution des dispositifs d’accompagnement. Sa logique est celle d’un contrat passé entre le jeune et la société : la société fournit aux jeunes éloignés de la vie active un accompagnement financier pour assurer leur autonomie. En contrepartie, le jeune s’engage à suivre une formation qualifiante et à poursuivre une recherche d’emploi active. Cette formule a permis de réduire à 14 % le taux de chômage des jeunes au Danemark. Elle pourrait être généralisée et remplacer le maquis de dispositifs existants. Elle serait personnalisée pour répondre au mieux aux besoins des jeunes plutôt que de leur imposer un dispositif rigide conçu en hauts lieux.

Pour porter ce dispositif, les structures doivent donc être rationalisées. Il s’agirait de former un «Pôle emploi jeunes» décentralisé à l’échelle des bassins d’emploi autour des missions locales. Une telle réforme des politiques d’insertion des jeunes permettrait de redonner une chance à une génération sacrifiée et de faire ainsi prévaloir une logique de long terme dans nos politiques publiques.

Elle contraste avec les propositions d’inspiration néolibérale («SMIC jeunes», «contrat premier embauche») qui, appliquées en Espagne et en Italie, n’ont eu pour conséquence que de sortir du marché du travail les jeunes les moins qualifiés et de tous les précariser. Alors, pourquoi continuer avec des politiques qui ne marchent pas ? Il est grand temps de faire #autrement !

Le collectif #Autrement rassemble des jeunes de tous les horizons, engagés à gauche, encartés ou non, qui ne se sentent plus représentés par la politique traditionnelle et qui considèrent que, face à l'apathie des partis, y compris de la gauche, la nouvelle génération doit se prendre en main pour imaginer le monde de demain #Autrement.