«En 2007, les Français ont confié le destin du pays à Nicolas Sarkozy. Depuis, nous - qui faisons partie des groupes minorés - sommes insultés tous les jours. Ce que l'on entend aujourd'hui n'est pas pire que la création d'un ministère de l'Identité nationale. Ce n'est pas plus affligeant que la sortie de Manuel Valls réclamant plus de "Blancs, Whites, Blancos" à Evry. On s'offusque d'entendre une responsable politique expliquer que les Blancs seraient les ayants droit du pays. Or, dans le documentaire Un temps de président, les Français ont constaté que François Hollande était entouré de conseillers blancs. Tout le monde a trouvé cela normal. La pensée réac n'est pas en plein essor. Elle tombe le masque. Les Afrodescendants sont résilients. Ils respirent, travaillent à l'émergence d'une France post-raciste. Ce n'est pas seulement une autre pensée qu'il conviendrait de promouvoir, mais des pratiques différentes. L'antiracisme véritable consisterait, pour les membres du groupe dominant, à refuser d'évoluer dans un entre-soi monochrome. Combien de collègues avez-vous qui soient issus de groupes minorés et qui aient le même statut que vous ? Si vous n'en avez pas, pourquoi le tolérer ? Il est plus facile de produire des discours que de remédier à ce problème. Pour qu'une autre parole soit audible, il faut d'abord que tous soient représentés, dans tous les milieux. Des politiques volontaristes sont nécessaires. Il y a peu, j'ai retiré une de mes pièces choisie pour être lue à la Comédie-Française. Le Français proposait une troupe essentiellement blanche. Les personnages sont subsahariens et afrodescendants. Il s'agissait d'intégrité, pas de stratégie.»
Interview
Léonora Miano «La pensée réac tombe le masque»
par Sonya Faure
publié le 16 octobre 2015 à 19h26
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