Chaque semaine, la rédaction du magazine Books, décortique les longs formats des revues et sites anglo-saxons. Morceaux choisis aujourd'hui par Delphine Veaudor.
Goethe à tout faire
S'il vivait aujourd'hui, Goethe donnerait probablement des conférences pour expliquer comment écrire un bestseller, comment gérer un super ministère et comment mener une bonne vie. Homme de confiance du duc de Weimar, il jonglait entre une multitude de dossiers, de l'exploitation minière aux affaires culturelles. Entre deux chefs d'œuvre, il écrivait des essais scientifiques et des lettres (énormément de lettres : plus de 20 000). Il recevait quantité de visiteurs, qui souvent s'empressaient de publier le récit de leur rencontre avec le « sage de Weimar ». Les esprits chagrins accusèrent son Werther de causer une épidémie de suicides : les lecteurs s'identifiaient à son personnage, alors que Goethe en faisait un repoussoir. Car lui-même prônait l'humilité, le sens de l'effort et celui des responsabilités.
A lire iciNew Yorker, 1er février, 25 000 signes
Auteur : Adam Kirsch est un critique littéraire et poète américain. Il collabore régulièrement au New Yorker, au Times Literary Supplement et à la New York Review of Books.
Votre rein sur Facebook
Une page Facebook. La photo d'une petite fille intubée. Et un appel : « Delfina a besoin d'un foie.» Les campagnes de ce genre fleurissent au Canada. Le pays est l'un des rares à autoriser le don d'organes altruiste. N'importe qui a la possibilité de donner gratuitement, de son vivant, un morceau de foie ou un rein à un parfait inconnu. Formidables outils de mobilisation, les campagnes sur Internet ne sont pas sans poser des questions éthiques : qui a le plus de chances d'être sauvé et pourquoi ? Quand le système médical recourt à des critères objectifs pour déterminer le niveau de priorité d'un receveur (sévérité de l'atteinte, chances de survie), les réseaux sociaux jouent sur l'émotion. Et sur la capacité des familles à se mettre en scène. Certains s'inquiètent. Le don d'organes ne doit pas devenir « un concours de beauté ».
A lire ici The Guardian, 16 décembre, 25 000 signes.
Auteur : Nicholas Hune-Brown est un journaliste canadien friand de reportages et enquêtes au long cours. Son travail paraît notamment dans Toronto Life, The Walrus et Reader's Digest.
L’email aussi a une histoire
Le premier courrier électronique est réputé avoir été envoyé en 1971 par Raymond Tomlinson, un ingénieur américain qui travaillait au développement d'Arpanet (l'ancêtre d'Internet). Deux décennies plus tard, le courriel était devenu un élément central de la culture Web. « Si tu n'as pas d'adresse Internet, tu es étiqueté comme un "nobody", quelqu'un qui a plus de 40 ans », déclarait en 1994 un internaute (de 37 ans) interviewé par le New York Times. De nos jours, de plus en plus d'utilisateurs s'agacent de l'accumulation de messages dans leurs boîtes et du temps perdu à les trier. Mais le succès de l'email ne semble pas se démentir : il s'en échange environ 75 mille milliards par an.
A lire ici The Atlantic, 6 janvier, 20 000 signes.
Auteure : Adrienne Lafrance est journaliste au magazine The Atlantic, où elle couvre les nouvelles technologies.