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Libération
Billet

Droit des femmes : du ministère aux couches-culottes

publié le 12 février 2016 à 19h31

Laurence Rossignol vient d'être nommée ministre de la Famille, de l'Enfance et des Droits des femmes. Les faits sont têtus : le temps d'un quinquennat, les droits des femmes auront - au moins symboliquement - considérablement rétréci, passant d'un ministère de plein exercice à un secrétariat d'Etat rattaché aux Affaires sociales, pour finir, certes dans un ministère, mais accolé… à la Famille et à l'Enfance. «N'est-ce pas enfermer les femmes dans le rôle stéréotypé qui leur est assigné depuis des siècles : celui d'épouse et de mère ?» se demandent Danielle Bousquet, présidente du Haut Conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes, Chantal Jouanno, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité du Sénat, et Pascale Vion, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité du Conseil économique, social et environnemental. Le collectif Les Effronté-e-s renchérit : «Encore une fois, comme c'était de coutume sous la droite, l'Etat assigne les femmes aux thématiques de la famille et de l'enfance !» La création d'un ministère dédié aux Droits des femmes était un engagement du candidat Hollande, on n'avait pas vu cela en France depuis celui d'Yvette Roudy, en 1985. A l'époque de sa re-création, en 2012, les féministes avaient applaudi, espérant, pauvres naïves, qu'enfin, les droits des femmes, qui sont loin d'être circonscrits à la famille et l'enfance - et concernent, par exemple, l'emploi, l'éducation, la santé, la justice - auraient leur place au gouvernement ; qu'un(e) vrai(e) ministre pourrait influer sur le cours des choses, des discussions, des projets ; et donc que les droits des femmes, sujet transversal par excellence, seraient partout. Elles auraient sans doute dû se méfier lorsqu'elles ont appris, dès 2012, qu'on avait attribué à Najat Vallaud-Belkacem la double casquette de ministre ET porte-parole du gouvernement ; comment concilier les deux ? Elles se sont méfiées lorsqu'en 2014, ledit ministère est devenu un secrétariat d'Etat, rattaché au ministère des Affaires sociales, de la Santé et des Droits des femmes. Aujourd'hui, même si elles sont conscientes de l'attention particulière que porte Laurence Rossignol à ces questions - c'est en partie pour cela que la Manif pour tous avait été ulcérée, en 2014, par sa nomination à la Famille -, les féministes s'alarment de voir ces sujets accolés à la Famille et à l'Enfance, renvoyant symboliquement les femmes à leur fonction supposée première : enfanter et fonder un foyer. Bienvenue en 2016.