Avec 33 000 festivaliers
selon les organisateurs, et la police qui rapporte au moins 6 000
autres personnes n'ayant pas pu accéder à l'évènement qui
affichait complet, le festival Amani de Goma, dans l'est de la
République Démocratique du Congo, n'en finit pas de grandir. En
l'espace de trois éditions, il s'est imposé comme un évènement
incontournable de l'agenda culturel de l'Afrique des Grands Lacs.
L'organisation du festival, majoritairement assumée par des
Congolais, est un pied de nez à ceux qui ne voient en Goma que la
capitale mondiale du viol et de l'assistance humanitaire.
Les 12, 13, et 14 février 2016,
la Germano-Ghanéenne Nneka, le Sénégalais Ismael Lô, et le Kinois
Werasson et bien d'autres défiler sur la scène installée bien en
vue du volcan Niyragongo,
Pourquoi
le festival a-t-il lieu à Goma ? Parce
que c'est là que la Foyer Culturel de Goma se trouve. Le festival
est vraiment une émanation du Foyer Culturel [Guillaume Bisimwa est par
ailleurs l'ancien directeur du Foyer Culturel ndlr]. C'est difficile
de déplacer tout le monde et nous voulons, et avons besoin, de cette
base solide. Le festival vient des jeunes de Goma et il y aurait peu
de sens à être autre part qu'à Goma. La ville est aussi la
capitale de la province du Nord Kivu, qui a connu plusieurs années
de guerre, donc c'est un endroit qui, symboliquement, est important.
C'est aussi un endroit où les gens de toute la province [grande
comme deux fois la Belgique] se retrouvent facilement.
«Jouer pour le changement, chanter pour la paix», proclame la banderole au dessus de la scène de du festival Amani, le 16 février 2014. Photo Alain Wandimoyi / AFP
Quelle place
trouve la musique dans l'Afrique des Grands Lacs et comment le
festival s'inscrit-il dans la tradition musicale ?
La région a une
belle et énorme tradition musicale. Dans chaque pays, au Congo, au
Burundi, au Rwanda, et au Ouganda, il y a une forte histoire musicale
-et bien entendu la musique congolaise est très réputée
internationalement. Le festival donne aussi la place aux danses et
musiques traditionnelles. Ici, historiquement, et d’ailleurs toujours
maintenant, toute fête, tout évènement, que cela soit une
naissance, un décès, ou un mariage, est l’occasion de jouer de la
musique. On voit bien différentes traditions de tambourinaires par
exemple, qui sont d’ailleurs représentées au festival. La musique
est une occasion de rassembler la population du village autour du
chef coutumier. Le festival s’inscrit dans cette tradition et vise à
rassembler toute la population de Goma et des alentours.
A qui s'adresse
le festival ?
Le festival
s’adresse à la population des pays des Grands Lacs, et bien entendu
particulièrement à la jeunesse de Goma qui vient toujours en grand
nombre. Il n’y a pas d’autre évènement de cette ampleur à Goma.
Nous avons aussi des festivaliers et des musiciens qui viennent du
Rwanda voisin, et c’est particulièrement important pour la
réconciliation entre nos peuples déchirés par la guerre. Au
festival, tout le monde est égal : le petit et le grand, le
Congolais et l’étranger. Enfin, avec les médias internationaux,
nous essayons de nous adresser au monde et de donner une image
différente de l’est de la République Démocratique du Congo.
Nous préparons déjà
une nouvelle édition du festival, en apportant comme chaque année
des innovations. Cette année c’était un espace de promotion des
jeunes entrepreneurs, des bourses pour les lauréats d’un concours
musical local, et des écrans géants. Nous allons voir quelle folie
est possible l’année prochaine ! Tout cela dépend bien entendu
de nos sponsors, cette année TMB (banque), Primus (brasserie) et
l’ambassade nous ont bien soutenu et nous espérons que cela pourra
continuer.